Au Kazakhstan, le cinéma continue à s’émanciper. Des genres, comme politiquement.
Il va falloir commencer à retenir le nom d’Adilkhan Yerzhanov, cinéaste kazakh en activité depuis une dizaine d’années, mais se faisant une place tardive sur nos écrans. Si on l’avait repéré lors des sorties de La tendre indifférence du monde ou d’A dark dark man, revisite surprenantes du film noir comme des sagas pastorales, un inespéré doublé débarque dans les salles pour l’imposer. Et plus encore affirmer sa diversité.
Dans L’éducation d’Ademoka, une ado aimerait bien étudier, mais s’en voit privée. Elle est lyuli, la version locale des roms, tout aussi discriminée. Un écrivain reconverti en prof va pourtant le prendre sous son aile. Yerzhanov se fait Kusturica d’Asie centrale avec immersion chez les gitans des steppes. La fable colorée ne se laisse pourtant jamais aller à s’égarer dans des excès de poésie, re-venant toujours sur Terre pour consoler les sorts d’une gamine ostracisée malgré elle et d’un intellectuel précaire. Yerzhanov leur laissant toujours une porte ouverte sur des horizons plus lumineux, tout en conservant son étude d’un Kazakhstan encore coincé entre conservatisme et envies d’émancipation.
L’isolement est aussi une donnée d’Assaut. Un collège au milieu de nulle part y est assiégé par un groupe terroriste ou mercenaire, laissant les parents et la maigre police locale monter une opération de sauvetage des élèves otages. Si la tension monte rapidement, Assaut y procède à des injections humoristiques, autour de cette brigade improvisée, pieds nickelés, apprenant comme ils peuvent à manier les armes ou créer un rapport hiérarchique. Pas très éloignée, dans la maitrise du rythme comme des ruptures de ton, du cinéma sud-coréen actuel, Assaut oscille entre film d’action et comédie absurde. Quoique pas tant que ça, quand sous cette mini-odyssée, perce une charge grinçante contre une société gangrénée par la corruption jusqu’au grotesque. Qu’elle se déroule dans un espace ultra-dénudé renforce un fonds engagé que l’on n’avait pas vu venir, pronant un droit à la désobéissance comme ultime sursaut éthique face à une bureaucratie aussi galopante que sclérosée.
Deux films, mais pas tout à fait deux ambiances différentes, L’éducation d’Ademoka comme Assaut tenant, de brillants manuels d’apprentissage à la rébellion pour les Kazakhs, conscients des risques que cela engendrerait, mais aussi des espaces démocratiques qu’ils pourraient inaugurer.
En salles le 12 juillet.