L’hymne contestataire du Kenya, présent dans la plupart des manifestations, est un morceau de rap enregistré dans un studio de Nairobi, par deux rappeurs de 22 ans.
Il y a quelques mois, le duo Wadagliz sortait le titre « Anguka Nayo ». Jamais ils ne se seraient douté qu’il deviendrait l’hymne des manifestations qui ont secoué le Kenya ces dernières semaines. Début juin, la jeunesse kényane prend les rues pour dire non au projet d’augmentation des taxes dans le budget, dans un deuxième temps, la contestation vise le président William Ruto, sa gouvernance et la corruption dans le pays.
Dans les cortèges, résonne ce fameux morceau, “Anguka Nayo”, qu’on peut traduire par « suis le mouvement », mais aussi littéralement « tombe avec lui ».
Le morceau n’avait, à l’origine, aucune tonalité contestataire : « c’est plutôt un tube de club », admet l’un des deux comparses. Écrit il y a un an, il s’appuie sur un sample de la chanson « Kufa Juu », succès de l’arbantone, un style de musique très à la mode au Kenya, porté par une nouvelle génération d’artistes basés à Nairobi. L’arbantone représente des rythmes échantillonnés à partir de tubes kényans de la vieille école, calibré pour des succès et des trends sur le réseau social Tiktok.
Une recette marketing qui fonctionne également pour le titre du duo. Les jeunes kényans, en choeur dans le cortège contestataire, ont donc entonné le refrain avec la choré qui l’accompagne : les bras balancés vers l’avant en se déhanchant vers le sol. Résultat : un demi-million de vidéos Tiktok ont été postées sur ce morceau, la plupart filmées en manifestations.
Une contestation joyeuse, dansante et chantante à laquelle la police a répondu par des gaz lacrymogènes, des balles en caoutchouc et parfois des balles réelles. Au moins 60 personnes ont été tuées, et suite à cela, le projet de taxes contesté a été suspendu… Jusqu’au 19 août, où le ministère des Finances a remis le projet sur la table ; propice à une nouvelle vague de protestations, certainement en musique.
Ce n’est pas le seul hymne inattendu du mouvement, il y avait également « Not Like Us » de Kendrick Lamar, ce qui était un roast de Drake a été réécrit par un rappeur qui l’a transformé en appel au soulèvement et à un changement de gouvernement.