Militante acharnée de la décroissance, cette actrice et autrice parisienne partage l’appel des « Soulèvements de la Terre », un mouvement écocitoyen national qui entend ce printemps « bloquer et démanteler les industries du béton, des pesticides et des engrais de synthèse ».
« Avant, l’eau courante, c’était l’eau libre, celle qui coulait, qui circulait… On a bidouillé le mot : l’eau courante, c’est devenu l’eau du robinet, celle qu’on peut couper, mesurer, taxer. C’est devenu notre eau. Tu sais que l’Inde, l’Afrique, tous ces continents-là sont pas encore passés à une gestion privée de l’eau. Et qui est-ce qui a décroché le marché ? C’est bibi, c’est les Français. On a fait adopter à l’ONU les objectifs du développement durable : fini le droit de récolter l’eau de pluie, de boire l’eau des rivières. Il faut passer par nous. Tu vas pouvoir en acheter des p’tits bodys ma chérie, tu vas arrêter de culpabiliser. Ça va être une princesse ma fille – si c’est une fille. D’ailleurs, si c’est une fille, on peut l’appeler TINA, c’est joli, Tina. There Is No Alternative. »
C’était l’un des shows les plus prometteurs de 2020, présenté juste avant le coma prolongé du spectacle vivant : Billion Dollar Baby, écrit et interprété par Audrey Vernon, vu à la Nouvelle Seine (Paris), dans lequel l’autrice anticapitaliste de Comment épouser un milliardaire adresse une lettre à son enfant à naître, dans l’espoir de lui expliquer, en une heure, notre Histoire par le prisme des ravages de la civilisation industrielle, « les inégalités, l’argent, l’État, la guerre, les voitures, les avions, l’énergie, les déchets… ».
Ce texte réjouissant est depuis devenu un livre, publié aux éditions Libre. Et tandis que les occupations de théâtre se multiplient partout dans l’Hexagone, Audrey Vernon a décidé d’entamer une « tournée des ZAD », qui démarre le 27 mars aux Vaîtes, trente-quatre hectares de jardins populaires et de terres maraîchères, un écosystème autogéré, menacé depuis 2005 par un projet porté par la ville de Besançon. Ce sera aussi et surtout la première date des « Soulèvements de la Terre », un mouvement écocitoyen national né de l’union de centaines de collectifs, associations et personnalités à partir de ce constat malheureusement lucide : l’État et la politique ne nous sauveront pas du désastre écologique et humain en cours. Il s’agit donc pour elles et pour eux de « faire barrage en masse à l’artificialisation des terres et de s’opposer aux institutions et industries qui perpétuent l’empoisonnement des sols ».
Grimpant à bord de notre Arche, Audrey Vernon a choisi de partager plusieurs passages du manifeste des « Soulèvements de la Terre », qui entendent « bloquer et démanteler les industries du béton, des pesticides et des engrais de synthèse ». Avec cet autre rappel : « Dans les dix ans à venir, la moitié des exploitant·es agricoles de France va partir à la retraite. Concrètement, près d’un tiers de la surface du territoire national va changer de main. C’est le moment ou jamais de se battre pour un accès populaire à la terre, pour restaurer partout les usages et les égards à même d’en prendre soin. » En voici, donc, des alternatives, pour la petite Tina.
Pour lire l’appel intégral des « Soulèvements de la Terre » et connaître le calendrier des actions prévues ce printemps dans plusieurs villes de France, c’est ici : https://lundi.am/Les-Soulevements-de-la-Terre-3871
Pour voir un extrait énergétique de Billion Dollar Baby, c’est ici : https://www.youtube.com/watch?v=MdFQFiuAuhA
Pour écouter la précédente utopie d’Audrey Vernon pour L’Arche de Nova, c’est toujours là : https://www.nova.fr/news/audrey-vernon-demain-les-voitures-seront-remplacees-par-des-rosalies-40676-15-09-2020/
Réalisation : Mathieu Boudon.
Image : Woman at war, de Benedikt Erlingsson (2018).