Aupinard n’est pas le seul ni le premier à infuser sa musique de bossa nova. Une poignée d’artistes français piochent dans la bossa, la samba, pour créer un genre hybride, terriblement chaloupé. Pour en parler, on a convié Myra dans nos studios.
Sur Nova, on diffuse un artiste qui a explosé sur les zinternets (les zinternets voulant souvent dire « Tik Tok ») : il s’appelle Aupinard et, si vous ne le connaissez pas encore, il fait des trucs comme ça :
On soutient aussi Myra, cette artiste talentueuse d’origine grecque, venue dévoiler les morceaux de son EP Passion Câlins en avant-première dans notre Bal de Nova, à Bordeaux.
Mais quel est le point commun entre ces deux artistes ? Leur morceau commun « des bisous », oui. Mais plus largement, c’est leur musique qui se nourrit d’influences rap et bossa nova. Ce genre originaire du Brésil et musique star des années 60, revient en force dans la nébuleuse musicale française.
Quand on dit bossa, vous pensez certainement aux musiciens emblématiques brésiliens comme Antonio Carlos Jobim, auteur des cultissimes « Garota de Ipanema » ou « Águas de março », Bebel, Astrud et João Gilberto…
C’est aussi à ces artistes que pense Myra en réfléchissant à ses influences latines. Eux et Luiz Bonfà. Des artistes qui s’ajoutent à sa culture du jazz, de la soul d’Erikah Badu, de blues. « Puis, à l’adolescence, je ponce le rap cain-ri, le rap UK et le rap français. » C’est en faisant du beatmaking que l’hybridation s’impose : « J’ai essayé de retranscrire ce que j’aime dans ces musiques latines, les percussions, les gammes mélodiques qui sont toujours très bleues… J’ai donc retranscrit ça dans la musique que je fais, plus moderne, digit’. »
« Les influences latines arrivent très fort »
Pour Myra, c’est un mouvement global : le rap devient de plus en plus mélodieux, et quelques artistes ne se satisfont plus de la MAO. Ils veulent des instruments joués, pour un son plus organique. « Donc, oui, notamment des influences bossa, samba, des sons chauds. Les influences latines arrivent très fort. » À notre micro, Myra cite tout de suite Némir, Gros Mo et Aupinard. Trois artistes qui sont en featuring sur son dernier EP, Passion Câlins.
Avant la bossa : le Jazz Rap
C’est une perfusion qui a déjà eu lieu avec le papa de la bossa nova : le jazz. Un « Jazz Rap » trouve ses racines dans les années 80 et le sampling de morceaux jazz et soul. Puis, à l’utilisation du sample s’ajoute l’orchestration, qui reprend des gammes et des instruments jazz. Les jazzmen font du rap, les rappeurs posent sur du jazz : comme dans le merveilleux album de Miles David, Doo-Bop. Le rappeur Easy Mo Bee pose sur trois des morceaux du disque qui sera le dernier album studio enregistré par Miles Davis. Le trompettiste nous laissera avec une esquisse de ce qui aurait pu être une nouvelle ère musicale pour lui.
Une chose est sûre, la percée de la bossa dans le rap a commencé il y a bien des années avec du sampling dans les productions américaines. J. Cole, par exemple, sur « God’s Gift », a utilisé le morceau « Francisco » du brésilien Milton Nascimento.
Mais aussi avec Kanye West, Jay-Z, Kaytranada ou encore Madlib sur le « Rhinestone Cowboy » de Madvillain (album dont on a soufflé la 20ᵉ bougie il y a peu) :
C’est d’ailleurs au Brésil que Madlib s’est fait voler le prototype de son projet avec MF Doom, alors qu’il chinait des samples locaux. Le documentaire « Madlib Brasilintime », sorti en 2006, plonge dans ce voyage à São Paulo en 2002, entre les sessions digging de Madlib chez les disquaires de la ville et la confection de loops dans sa chambre d’hôtel.