Jacques, le génie visionnaire et égérie tonsure ultime revient avec un nouveau live performance, Vidéochose 360°. Rencontre.
Les textes sont métaphysiques, mantras de philosophie du quotidien et la manière, elle aussi, est toute particulière. Jacques est bruitiste, c’est-à-dire qu’il fait de la musique avec les sons des objets du quotidien : des stylos quatre couleurs, des élastiques, des pompes à vélo, des loquets de porte, des feuilles de papier, des canards qui font coincoin… Tout cela, sur scène, prend vie grâce à une grande machinerie de scénographie. Tout cela devient une techno sans pareil.
De Phonochose à Vidéochose
À l’origine, il y a Phonochose, le live qui l’a révélé en 2016.
Puis le Jacques nous a offert deux projets, l’EP Tout est magnifique et l’album L’IMPORTANCE DU VIDE en 2022. Un tournant plus pop pour un album qui « se prêtait vraiment à être interprété en groupe ». Jacques acquiesce. Sur scène, celui dont les cheveux ne poussent que sur les côtés alternait alors les moments Phonochos-esques et des tableaux plus pop, instruments-voix. À l’époque, Jeanne Lacaille l’avait convié dans son émission La Potion, pour parler méditation, se demander si la tonsure ne fait pas le moine…
Retour à la techno originelle
Nous voici maintenant avec Vidéochose 360°, un nouveau live performance présenté à La Gaité Lyrique. Tout est toujours magnifique. Nouvelle scénographie. Aux bruits s’ajoutent désormais des vidéos, issues d’internet. Bombardement de micro-images sur des écrans qui entourent la fosse du public, à 360°, donc. Les bruits servent de samples à la création techno qui se joue sur scène. Et puis on retrouve aussi les enregistrements de bruits en live, sous des dômes de verres dignes d’un labo d’expérimentation scientifique.
« J’avais besoin de revenir seul avec les machines » explique Jacques en loges, à la fin de ses deux premiers lives à La Gaité Lyrique. On ressent un tas de trucs, dans cette expérimentation musicale et visuelle. On a donc demandé des comptes à Jacques à ce propos : « L’émotion que je veux susciter, c’est un sentiment de facilité, de sérendipité, de coïncidence. C’est un peu comme quand des mots riment ensemble, on se dit ‘ah, mais ça sonne bien, ça doit être vrai’. Eh bien, là, j’ai envie de faire rimer, en quelque sorte, des bruits qui ne sont pas musicaux, pas verbaux. » C’est vrai qu’on a dansé sur de la techno qui inclue des chiens qui aboient, des vaches qui meuglent, des perceuses qui percent, des fusées qui décollent ou des bébés qui pleurent. « J’ai envie que les gens soient dans une espèce de monde paradisiaque pendant une heure, ou tout va bien ensemble.«
« Je développe des trucs qui n’existent pas encore, et qui sont complètement casse-gueules »
Pour orchestrer le tout, la machinerie est impressionnante. « Et en constante évolution » ajoute l’artiste. C’est une grande scénographie, une machine hyper pointue signée du collectif nantais Mains Libres, et parfois la machine contrôle un peu l’homme. « Ce que j’ai fait ce soir, ce sont les premiers tests de réalisation de mon idée. Je suis sur le développement d’innovations techniques dans la musique, donc je développe de petits logiciels, des trucs qui n’existent pas encore, qui me permettent de faire ce que je fais. Mais je suis en train d’embarquer sur scènes des logiciels qui sont complètement casse-gueules », que je ne maitrise pas encore totalement.«
Le grand chamane
« Mais j’ai toute la vie pour le faire », ajoute Jacques en souriant. Le projet va au-delà puisque Jacques se rêve un peu chamane : « J’aimerais en fait qu’à terme les gens sortent du concert comme d’une expérience mystique. Qu’ils pleurent et qu’ils s’en souviennent toute leur vie, tu vois. » Il ne plaisante qu’à moitié quand il ajoute en se marrant : « Je pense que je vais y arriver, mais j’aurai peut-être 50-60 ans, je serai tout maigre, tout sec, tout baraque, parce que j’aurai taffé toute ma life. Et au bout d’un moment, les gens ne pourront plus passer à côté, ils se diront ‘ah mais oui, c’est vrai que y’a lui, putain, il est déter’ quand même’, et moi je n’aurai pas lâché l’affaire. »
Techno tentaculaire
Il songe à performer dans le métavers. Avant ça, il a quelques idées pour le live entre humains de chair.
« Par exemple, là, sur scène, mon micro est dans un tube le long duquel court un flux de lumière, comme pour illustrer que le son passe bien dans le micro. Eh bien, je vois bien plusieurs musiciens avec ce même système, et leurs flux de lumières viendraient vers mon ordinateur central, un truc un peu tentaculaire ». En attendant, le seul moyen de choper ces nouveaux morceaux, c’est d’aller vivre Vidéochose, puisqu’aucun album n’est vraiment planifié.
Ah, et on oubliait
Jacques nous a aussi glissé un mot sur son petit protégé au doux blaze de Neniu, qui assurait la première partie. « C’est un artiste génial de la scène française disons ‘underground’, pour l’instant du moins. Je pense qu’il a en lui la magie », jugez par vous-même.