Rencontre entre notre programmateur et un digger de Gospel.
Budgie, un nom associé au producteur de légende Alchemist quand on fait quelques recherches Google, ce nom avait interpellé notre programmateur Emile Omar il y a quelques années avec des mixes incroyables consacrés au Gospel. Lors de sa venue dans l’ombre d’ALC et d’Action Bronson à Paris, notre Emile n’a pas résisté à l’envie de lui poser quelques questions.
The Gospel According To Budgie by Budgiefirebeats on Mixcloud
Emile Omar : Peux-tu te présenter en quelques mots ?
Hey, mon nom est Budgie. Je suis producteur, DJ et accro aux vinyles. Né et grandi à Londres, je vis actuellement à LA.
EO : Quand et comment t’est venu le désir de fouiller des morceaux de gospel et d’en sortir 2 mixtapes ?
C’est une longue histoire, j’ai d’abord entendu l’album R&G de Snoop Dogg en 2004, et il y avait dans le morceau d’intro un sample d’Andre Crouch qu’Alchemist a transformé en un beat… J’ai adoré ce morceau et après avoir trouvé le sample, j’ai toujours été en recherche… Des années plus tard, j’étais en vacances en Finlande avec une fille avec qui je sortais, et j’ai fini par trouver l’enregistrement d’Andre Crouch parmi les autres… En 2010, Je cherchais un enregistrement de boogie aux US et j’ai fini par trouver et d’acheter des disques de gospel, que j’avais oublié depuis ceux trouvés en Finlande. Rich Medina m’a présenté à Gene Brown à New-York, qui possédait certains des meilleurs morceaux de gospel que j’aie jamais entendu. Puis, je suis allé à Detroit et Chicago et, encore une fois, j’ai trouvé des morceaux de gospel encore plus fou. A la fin de mon voyage, j’avais environ 40 morceaux de gospel, ce qui m’a amené à faire mon premier mix quand je suis rentré. Deux ans plus tard j’ai décidé que j’avais besoin de nouveaux morceaux pour faire un autre mix et cette fois-ci, j’ai acheté 800 tracks de gospel, ce que j’ai utilisé pour le second mix. J’en ai encore assez pour faire 10 autres mixtapes !
THE GOSPEL ACCORDING TO BUDGIE II by Budgiefirebeats on Mixcloud
Beaucoup de morceaux viennent de pressages privés. Peux-tu nous en dire un peu plus sur ce type de morceaux ? Est-ce plus dur à trouver ?
L’une des raisons pour lesquelles j’aime le gospel est que les morceaux rares sont moins connus que les raretés dans d’autres genres. Donc si tu prends vraiment le temps de digger, fouiller, tu trouveras toujours des perles que personne d’autre n’a. Une fois que tu commences à regarder les sections gospel dans tout un tas de shops, tu commences à retrouver un certain nombre de mêmes morceaux mais il y a toujours quelque chose à découvrir. Chaque lieu a ses raretés, ses pépites. C’est comme tous les morceaux, la rareté varie selon le lieu.
Pas d’Al Green, Aretha Franklin ou Rance Allen sur les deux mixtapes. A cause de leur notoriété, problème d’esthétique ou d’autres raisons ?
Si on parle de gospel soul et funky, ce sont les premiers artistes que l’on mentionne. Ils font de la musique incroyable que j’ai et adore mais ce sont des terrains connus, qu’on a déjà parcouru. J’essaie de mettre en lumière ce qu’on n’a peu écouté. Et aussi, leur son est un peu trop « straight » par rapport à ce que ce que je recherche. J’aime le gospel qui sonne vraiment « gospel ».
Peux-tu donner 3 artistes/producteurs/compositeurs de cette famille du gospel qui ont une importance particulière à tes yeux, et pourquoi ?
The Clark Family, entre Mattie Moss Clark et sa progéniture (Clark Sisters), une douzaine d’albums de gospel géniaux qui on été faits entre les années 70s et 90s.
The Yancey Brothers. Aucun lien avec Dilla, ces deux natifs de Chicago ont écrit et produit un nombre incalculable d’albums gospel et « laïques » pour eux et d’autres.
James Cleveland. Des centaines d’albums sur Savoy font de lui l’un des artistes de gospel les plus prolifiques de tous les temps.
Est-ce que tu as des anecdotes (drôles, tristes, touchantes) concernant cette quête ?
Je ne suis pas tellement un « gospeller » de cœur, je suis un homme du hip-hop, de la soul funk. Il se trouve que le gospel correspondait à ce que j’aimais déjà… Je collectionne toute sorte de musiques depuis des années mais le gospel est ce qui m’a séparé et démarqué de tous ceux qui font ce que je fais. Mon travail sur le gospel m’a amené deux de mes plus grandes idoles. Deux semaines après la sortie de « The Gospel According to Budgie 2 », Alchemist m’a envoyé un message sur Twitter, à propos d’un projet avec lui et uniquement avec des samples de gospel.
Même Kanye West s’est retrouvé à utiliser l’un des morceaux du mix pour son album « Yeezus ». Coïncidence, le morceau qu’il a choisi venait d’un enregistrement de Chicago. Je l’ai même acheté dans le sud de Chicago ! (Kanye est originaire de Chicago).
Tout tourne autour de paroles religieuses et spirituelles. Est-ce que, par tes découvertes et écoutes de ces musiques, tu as trouvé un message (religieux ou non) ?
Je n’écoute pas pour trouver le message, même s’il y a énormément de messages positifs. J’écoute pour le ressenti et le son. Je ne suis ni chrétien ni religieux mais je crois qu’il y a une réelle spiritualité universelle qui vient à travers la musique.
Est-ce qu’il y a quelconque envie ou matériel pour faire un mixtape gospel non-US ?
Il y a tout un tas de styles de gospel aux quatre coins du monde, il y a des groupes britanniques qui ont les sonorités que j’aime, mais je n’en possède pas assez ni ne connais d’endroits où en trouver assez afin de faire comme je l’ai fait avec le gospel US.
Quels sont tes projets actuels ?
J’ai acheté beaucoup d’enregistrements brésiliens ces temps-ci, à suivre. D’autres mixtapes de gospels. Un autre projet de gospel avec Alchemist, et des beats/instrus pour divers rappeurs et chanteurs à LA et ailleurs.