La bibliothèque Marguerite Durand doit être relocalisée.
C’est la seule bibliothèque féministe de France. La bibliothèque Marguerite Durand doit être intégrée à la Bibliothèque historique de la Ville de Paris (BHVP) et beaucoup s’en inquiètent. Chez les chercheurs et les féministes, on s’alarme de voir ce centre de documentation perdre son individualité. Intégrée au sein d’un gros paquebot comme la BHVP, déjà saturée, ses fonds pourraient être dilués, invisibilisés, oubliés.
Et ils n’ont certainement pas besoin de ça, car la BMD recèle d’histoires de femmes et de femmes de l’Histoire dont on connaît à peine les noms. On s’inquiète d’autant plus que c’est pour lutter contre cette invisibilisation que Marguerite Durand (ci-contre), une journaliste féministe du début du XXe siècle, a légué son propre fond de documentation à la Mairie de Paris en 1932. Elle n’a posé qu’une condition : que la Mairie ouvre le premier « office de documentation féministe » et s’engage à l’entretenir.
Jusqu’ici, l’institution a tenu sa promesse. En 85 ans, la BMD s’est enrichie de quarante-cinq autres fonds et les soutiens financiers ont été au rendez-vous.
« Pour une bibliothèque d’histoire des femmes à Paris »
L’espace disponible est un réel problème. Si la BMD est boutée hors du XIIIème arrondissement, c’est parce que sa voisine, la médiathèque Jean-Pierre-Melville, doit s’agrandir. Le centre de documentation féministe aurait lui aussi grand besoin de s’agrandir, pour pouvoir recommencer à accepter de nouveaux fonds. Ce que demandent les associations qui la défendent, dans une nouvelle pétition notamment, c’est la création d’un nouveau lieu, qui lui soit propre, qui soit visible, et pérenne. « Pour un projet ambitieux de bibliothèque d’histoire des femmes et du féminisme à Paris », scande la pétition.
Celle-ci est signée en premier lieu par l’historienne Christine Bard. Spécialiste de l’histoire des femmes et du genre, elle a émergé comme une porte-parole naturelle pour la BMD, qu’elle avoue avoir arpentée de fond en comble. Elle rappelle l’importance pour le mouvements féministes d’avoir une bibliothèque à soi. « La Ville de Paris n’a pas l’air de réaliser sa chance d’avoir une belle bibliothèque sur l’histoire des femmes et du féminisme », notait-elle, toujours dans Télérama.
Christine Bard était aussi l’invitée de Lauren Bastide dans son podcast La Poudre, le 2 novembre dernier. L’occasion de sillonner les rayonnages de la BMD avec elle, et d’écouter ses multiples récits sur les femmes et les combats qui la peuplent, avec des archives remontant jusqu’au XVIIème siècle. L’histoire de Marguerite Durand, bien sûr, journaliste, qui a créé le quotidien féministe, La Fronde en 1897, mais aussi celle Madeleine Pelletier, par exemple, première psychiatrie française, et militante féministe aussi importante qu’oubliée.
Mobilisation, ce 18 novembre
Associations féministes, chercheuses et chercheurs, personnalités du monde médiatique, militants et soutiens se donnent rendez-vous devant la bibliothèque ce samedi 18 novembre à 14h pour témoigner de leur soutien à un lieu unique en France.