Ana Sofia Fonseca raconte la reine de la Morna, la femme libre qui a mis le Cap Vert sur la carte
Le label Lusafrica de José Da Silva a fêté ses 35 ans il y a quelque temps. C’est le label qui a produit et accompagné la carrière internationale de la capverdienne Cesária Évora. C’était l’occasion de célébrer à nouveau la reine de la Morna et voilà une seconde occasion : un documentaire, “Cesária Évora, la Diva aux pieds nus”, en salles le 29 novembre.
Ça trottait dans la tête d’Ana Sofia Fonseca depuis la cérémonie, 10 ans après la mort de Cesária Évora, en 2021 : raconter l’histoire de la reine de la Morna. Bonne idée. La réalisatrice capverdienne (qui a sa maison à deux pas de celle de Cesária) a récupéré des images filmées par ses proches, pour construire un documentaire. Très bonne idée.
Une heure trente environ d’allées et venues dans la vie de celle qui a mis le Cap Vert sur la carte. La trame du documentaire est nourrie de vidéos d’archives et d’enregistrements de chansons inédites, « un jour, un musicien m’a apporté un sac en plastique contenant plus de dix films » raconte la réalisatrice Ana Sofia Fonseca. « Il ne les avait jamais vus auparavant et m’a dit : “C’est pour toi, mais fais attention, je ne sais pas ce qu’ils contiennent ». Ensuite, nous avons commencé à trouver de nouvelles archives à droite, à gauche. Un jour, le manager de Cesária m’a dit qu’il possédait à l’époque une caméra, mais il ne savait pas ce qu’il avait fait des images. Plus d’un an après, il a retrouvé un sac en plastique avec des bandes. Nous étions en pleine pandémie et j’ai dû attendre d’avoir un vol Mindelo-Lisbonne pour les découvrir. »
Ce sont les interviews des proches de Césaria qui nous guident à travers les images. On y entend José Da Silva, la petite-fille Évora (Janete), des ami‧es, des journalistes, Seu Jorge…
Une heure trente pour raconter celle qui a grandi dans l’époque coloniale sur l’ile de São Vicente, et qui n’a connu la gloire qu’à 50 ans, avec son album « Mar Azul » de 1991. Un succès soudain à l’internationale qui l’a sortie de la pauvreté de sa ville de Mindelo où elle était plutôt méprisée, selon sa petite fille. On disait que sa voix était triste.
Da Silva, rencontré à Lisbonne, où Cesária jouait, a tout de suite cru en elle, en son génie musical qui fonctionnait à l’instinct. Il se demandait “comment ce serait possible de réussir dans une industrie obsédée par la beauté et la jeunesse, pour une femme noire aux pieds nus”. Le documentaire nous plonge aussi dans le décor avec des images du Cap-Vert aujourd’hui, le pays natal que « Cize » aimait tant, capturant la poésie de la mer, de la terre et de l’air qui ont façonné la femme et l’artiste.
Cesária, ses clopes, son whisky, ses pieds nus, son rire, sa liberté, son engagement et son gros caractère, il y a tout ça dans ce joli documentaire, en salles le 29 novembre prochain.
Ségo Raffaitin.