Jacques Blanchot. Peut-il y avoir un nom de personnage plus banal que celui-ci ? Jacques ressemble à son patronyme : c’est le genre de type qu’on ne remarque jamais, qui est à la fois tout le monde et personne. Tellement personne qu’il devient peu à peu invisible aux yeux de sa femme, de son patron, ou de son fils. Invisible amoureusement, professionnellement, socialement. Exactement pareil qu’un chien peut faire partie des meubles. Alors pourquoi pas en devenir un…
Le nouveau film de Samuel Benchetrit se refuse pourtant à aller sur le terrain d’un Michel Houellebecq pour devenir misanthrope ou faire l’éloge de la médiocrité. Sous ses apparences de portrait d’une époque où l’humiliation ordinaire est devenue une norme, Chien propose une inattendue forme de rébellion. En perdant tout, jusqu’à sa dignité, Jacques gagne une paradoxale liberté. Un propos bien plus dérangeant qu’il n’y paraît dans cette fable sur une mue en cours. Benchetrit l’assume en faisant glisser la comédie grinçante vers le violent malaise puis vers une sublime épiphanie finale.
Chien n’est pas un film qui s’apprivoise facilement, mais c’est ce qui en fait sa force. Sa subversion allant jusqu’à donner un rôle d’une bouleversante humanité à Vincent Macaigne, plus connu pour sa virulence rentre dans le lard. Remarquable choix quand derrière le regard de chien battu qu’il procure à Jacques, apparait peu à peu un appel à l’insurrection placide, au refus pacifique mais ferme des diktats. Tragique en apparence, Chien peut alors renverser son histoire kafkaïenne : il n’est plus ici question de métamorphose mais d’une mue vers une terrassante zénitude.
Sortie le mercredi 14 mars, d’ores et déjà des places à gagner grâce à Nova : retrouvez le mot de passe à cette adresse.