Membre d’un des groupes de R’n’B les plus en vue des années 60, mère et mentor de Whitney Houston mais aussi chanteuse de gospel récompensée par les Grammy, Cissy Houston a vécu un nombre incalculable de vies. En 1969, elle croise la route du King à Las Vegas.
En 1969, Elvis était en résidence à Las Vegas. Son contrat d’un million de dollars par an lui imposait deux concerts par jour, un en soirée et un à minuit. Le premier show du 26 août allait entrer dans la légende et Cissy Houston, qui vient de nous quitter à l’âge de 91 ans, n’y est peut-être pas pour rien…
Une choriste hyper réputée
Avant de rencontrer le King, Emily Drinkard, alias Cissy Houston, écumait les studios au sein du groupe de R’n’B The Sweet Inspirations. En vogue dans les années 60, les choristes ont chanté pour des stars aussi célèbres qu’Aretha Franklin ou Otis Redding. Après un premier divorce, Cissy Houston épouse John Houston Jr, avec qui elle a une certaine Whitney Houston en 1963. S’ensuit alors ce cocasse épisode à Vegas en 1969…
Elvis le déconneur
Certes Elvis avait un jumeau mort à la naissance, détestait le poisson et interdisait à sa femme d’en manger, certes il se shootait au beurre de cacahuète et était doté d’un léger bégaiement et certes il souffrait d’insomnies et avait une dinde en animal de compagnie. Mais Elvis était aussi un gros déconneur, un joyeux drille, un Gai Luron, un bout-en-train de première qui ne rechignait jamais à se taper la cuisse. Cette réputation de gros rigolo et farceur peu avare de facétie était sans doute un peu exagéré par le chanteur lui-même qui usait généreusement de son rire communicatif, jusque sur scène.
Le fou rire du King provoqué par ?
Le 26 août 69, Elvis était donc en concert à Vegas. Ce soir-là, comme d’habitude, il régalait son public en enchaînant les tubes et en s’épongeant le front avec ses célèbres foulards en soie qu’ils jetaient sur les femmes du premier rang. Au programme de ce concert, une quinzaine de classiques, parmi lesquels « Are You Lonesome Tonight« . Tout allait bien au moment ou Elvis entamait ce classique. Mais au bout d’une minute environ, on le devinait déstabilisé, au point de lâcher un petit rire, puis un deuxième, puis un troisième, avant de finalement partir dans un fou rire incontrôlable jusqu’à la fin du morceau…
La faute à Cissy Houston ? Les théories divergent
Ce moment d’anthologie a été enregistré, mais pas filmé. Les images qui circulent sur internet ne proviennent que d’autres concerts d’Elvis, et ont donné lieu à trois interprétations, qui toutes se défendent. La première évoque un spectateur au toupet de travers repéré par Elvis, la deuxième fait écho à l’actualité, tout comme la troisième, puisque toutes les deux font référence à Cissy Houston, à l’époque principale choriste du King. Il se dit que cette dernière chantait trop fort, voir couvrait la voix d’Elvis au point de le faire rire. Mais impossible de savoir s’il s’agissait d’un acte volontaire, un pari, ou d’un simple problème technique.
Toujours est-il que ce moment, devenu mythique, prend une tout autre dimension aujourd’hui avec le décès annoncée de Cissy Houston à l’âge de 91 ans… C’est l’occasion de revenir un peu sur la vie de cette femme qui fut bien des choses.
De la soul à la disco
Au début des années 70, Cissy Houston s’affranchit des groupes et entame sa carrière solo. Le succès se fait néanmoins encore timide. Elle reste une musicienne de session particulièrement demandée, collaborant avec les géants de la pop Burt Bacharach ou Paul Simon. Elle signe même occasionnellement quelques hits, tels que le mix disco-soul “Think It Over« , arrivé en 32ème place du Billboard R&B en 1979.
Une célébrité tardive : l’avènement de Whitney
Cissy Houston devient surtout le mentor de sa fille Whitney. C’est probablement la première à découvrir le potentiel de la star à en devenir, qui pose déjà dans des magazines pour ado au début des années 80. Whitney perfectionne son timbre de voix et se frotte à la scène pour la première fois au sein du groupe qui accompagne sa mère lorsqu’elle se produit dans de célèbres club R’n’B new-yorkais. En signant sur Arista Records, c’est à la fille d’emmener la mère vers la célébrité, sur le tard, après plus de 20 ans de carrière. Elles reprennent ensemble « I Know Him So Well« , tirée de la comédie musicale Chess, en clôture de l’album Whitney, qui fut l’un des plus grands succès de l’histoire du disque, vendu à plus de 20 millions d’exemplaires dans le monde.
Défendre l’héritage
Vient ensuite la reconnaissance pour Cissy, qui remporte deux Grammys pour les long-formats de gospel Face to Face et en 1999 pour He Leadeth Me. A la mort de sa fille, en 2012, elle devient l’intransigeante protectrice de son héritage. Elle s’est notamment fait le détracteur d’un biopic de Lifetime (2014) et du documentaire “Whitney”, paru en en 2023. Se lançant dans l’écriture, elle publie en 2013 ses mémoires Remembering Whitney : My Story of Life, Loss, and the Night the Music Stopped.
D’une choriste d’Elvis Presley à Végas à la mentor d’une des voix les plus connues au monde, en passant par un carrière de chanteuse de gospel, Cissy Houston a vécu mille et une vies. Plutôt pas mal.