Si la house et la techno avaient été de l’autre côté du mur.
Pendant 25 ans Μелодия, (mélodie en russe) était le seul et unique label de musique au sein de l’URSS. Et il était bien évidemment dirigé par l’État, qui contrôlait l’ensemble de la chaîne de production.
Aujourd’hui, c’est donc logiquement la plus grande source d’archives musicales de la période soviétique avec plus de 230 000 références musicales. Un océan de musique qu’il nous reste encore à explorer. Parmi ces explorateurs, figure Guus van Bentum qui nous relate ce long voyage dans ces archives.
« Je suis né en 1989, l’année de la chute du Mur. Beaucoup de zones d’ombres de la période communiste commencent alors à être à nouveau mises en lumières et il s’avère que de nombreux musiciens enregistraient de la musique électronique depuis des années, avec un son à la fois unique et pourtant proches des enregistrements de l’ouest.
Quelques années plus tard alors que je commençais à collectionner des disques, j’ai acheté un 33 tours avec des remixes et des edits de disco et de musique électronique soviétique (The Very Soviet Cut-Outs), et cela m’a énormément intrigué.
Le problème est qu’aujourd’hui Discogs ne recense par exemple que 25 848 titres, pour les non bilingues comme moi, le digging est extrêmement long. Du fait d’une censure très forte exercée sur le label par le gouvernement, la musique électronique que l’on retrouve sur Μелодия n’ont pas du tout les mêmes intentions (comme celles, plutôt sexuelles que l’on retrouve dans la musique produite aux Etats Unis à la même période par exemple). Cette musique était produite à des années lumières des clubs et des sous-sols moites. Ils étaient pensés pour des cours d’Aerobic ou des bandes sons de films.
Enormément de cette musique n’a jamais dû être publiée et doit moisir sur des bandes inexploitées. Quelques-unes ont pu être découvertes dans le pays grâce à des copies pirates. Par exemple, l’album Banana Islands du groupe Vesyolye Rebyata a connu un grand succès en dépit de son interdiction par la censure.«
Pour Strange Sounds From Beyond, Guus van Bentum a compilé sept morceaux électroniques de ce label qu’il a pu recenser. Et il vous invite à prêter une oreille attentive quand vous tombez sur ces lettres en alphabet cyrillique : Мелодия car il peut bien souvent s’y cacher de bonnes surprises.
Visuel : (c) DR