Le 10 mai marque la journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leur abolition.
Peu de personnes connaissent Louis Delgrès, né en Martinique et mort en Guadeloupe, général de carrière, mais surtout chef de la résistance contre les troupes napoléoniennes envoyées pour rétablir l’esclavage en Outre-Mer. Les mots de sa proclamation anti-esclavage, « À L’Univers entier, le dernier cri de l’innocence et du désespoir », du 10 mai 1802, résonnent encore : « Il existe des hommes malheureusement trop puissants par leur éloignement de l’autorité dont ils émanent, qui ne veulent voir d’hommes noirs ou tirant leur origine de cette couleur, que dans les fers de l’esclavage ».
Du 10 mai au 10 juin, le mois des mémoires
Nul hasard si cette date, le 10 mai, a été choisie par le président Jacques Chirac en 2006 comme « journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leur abolition ». Le 10 mai, c’est également l’adoption à l’unanimité par le Sénat, en 2001, en deuxième et dernière lecture, du texte de loi proposé par Christiane Taubira reconnaissant la traite et l’esclavage des populations africaines, amérindiennes, malgaches et indiennes, comme un crime contre l’humanité. Une date éminemment symbolique donc, qui ouvre chaque année, le « mois des mémoires » et marque le début des commémorations jusqu’au 10 juin, date de l’abolition de l’esclavage en Guyane.
Cette année, des commémorations en ligne
Mais en 2020, si les cérémonies officielles sont maintenues, dans le respect des règles sanitaires, il a fallu innover. C’est le rôle de la Fondation pour la Mémoire de l’Esclavage, présidée par Jean-Marc Ayrault, et dirigée par Dominique Taffin, qui coordonne cette journée. Les célébrations auront lieu en ligne, et le programme s’annonce chargé.
Toute personne qui le désire est encouragée à contribuer à un challenge participatif organisé sur les réseaux sociaux. Il suffit de se filmer face caméra, d’utiliser le hashtag #Cestmonhistoire, et de répondre à une série de questions parmi lesquelles : « Savez-vous pourquoi il y a des noirs en France ? Et depuis quand ? » ; « L’histoire de la traite et de l’esclavage est assez méconnue en France, à votre avis pourquoi ? ».
#Cestmonhistoire
Deux heures d’émission en live, de 14h à 18h, sur Facebook suivront, offrant une tribune à de nombreuses personnalités, invitées à débattre et échanger : Christiane Taubira, bien sûr, mais aussi Joey Starr, Agnès B, Angélique Kidjo, Fanny Glissant, Aïssa Maïga, Christine Salem, Pap N’Diaye, et le groupe Delgrès, pour n’en citer que quelques-uns.
Une commémoration digitale animée par Bintou Simporé et Claudy Siar, par ici. Par ailleurs, musées, bibliothèques, archives valoriseront leurs collections numériques sur l’esclavage.
L’esclavage, page manquante de l’Histoire ?
Car si la France est l’un des seuls États au monde à avoir reconnu la traite négrière et l’esclavage comme des crimes contre l’humanité et ce, depuis la loi Taubira de 2001, les questions mémorielles continuent de poser de nombreux défis ; en particulier, l’ignorance du passé colonial français de l’opinion publique. C’est pourquoi le thème choisi cette année est « la page manquante », symbole de cette méconnaissance qui non seulement nie l’histoire familiale de milliers de personnes, mais continue de perpétrer racisme et discriminations.
L’un des objectifs affichés de la Fondation, reconnue d’utilité publique, est de parvenir à toucher ceux qui justement, pensent ne pas être concernés par cette page de l’Histoire. À côté d’autres enjeux : fournir des clés de compréhension à la jeunesse, afin qu’elle se réapproprie son passé ; mettre en lumière les traces laissées par l’esclavage dans nos sociétés contemporaines ; soigner les blessures de ceux qui sont travaillés par cette mémoire. Pour honorer les paroles de Louis Delgrès : « La résistance à l’oppression est un droit naturel. La divinité même ne peut être offensée que nous défendions notre cause ; elle est celle de la justice et de l’humanité : nous ne la souillerons pas par l’ombre du même crime ».
Expliquer, transmettre, partager. La Fondation pour la Mémoire de l’Esclavage vous donne rendez-vous pour le Mois des Mémoires. Comprendre le passé, c’est préparer l’avenir. Parce que c’est notre histoire. #Manifesto #10mai #PaOubliye#FME #Cestnotrehistoire pic.twitter.com/gUgAOLCN6k
— Fondation pour la mémoire de l’esclavage (@fondation_me) May 7, 2020
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