À la base, ils s’appelaient Pogue Mahone. Une transcription à l’anglaise de póg mo thóin ; l’équivalent gaélique du kiss my ass. Sauf que quand on veut passer sur la très probe BBC, vendre quelques disques, c’est pas franchement l’idéal d’arborer un blase pareil. Pogue Mahone devient The Pogues.
Mais davantage que l’histoire de ce groupe londonien aux consonances celtes, c’est le parcours, les péripéties, la verve de punk et de pub de son leader irlandais, l’impayable Shane MacGowan, que le film Crock of Gold s’est attaché à mettre sur pellicule.
À la réalisation, un vieux briscard du rock UK, Julian Temple. Son premier film, c’était le Great Rock’n’roll Swindle manigancé par McLaren et les Sex Pistols. Devenu depuis un clippeur émérite (pour Bowie, Blur, Dexy’s Midnight Runners, Depeche Mode ou … Téléphone !) et spécialiste du biopic (pour Joe Strummer, les Pistols ou Dr Feelgood), Temple compose ici un portrait dense et viscéral, bricolé à la colle et à l’épingle à nourrice, d’une figure rock à la trogne mémorable ; un Brendan Behan folk-punk où le magnifique le dispute au désastreux, le vachard à l’émouvant, à la manière de ce « Dirty Old Town » partagé avec Alain Bashung (qu’on a rarement vu aussi arraché).
Contraint de ruser et d’obliquer, puisque MacGowan a refusé de passer à confesse de manière « classique », Crock of Gold (nommé d’après le nom d’un album des Popes, sorti en 1997) compose avec des images d’archives, des interviews, des témoignages, des séquences animées ou rejouées, des lives aussi, éléments que Temple complète en interrogeant le principal intéressé dans son milieu naturel, tel un reporter animalier : à la volée, au bar notamment, avec comme éclaireurs et porte-micros missionnés l’ex-politicien de Sinn Fein Gerry Adams, Johnny Depp ou l’illustre Bobby Gillespie, de Primal Scream.
L’occasion de parler, entre deux verres, de l’Irlande, de l’engagement politique, des chausse-trapes tendus par le succès, de la fin des Pogues et de l’affreux single « Fiesta » (qui fut le générique de la pochade TV Sébastien C’est Fou !, eh oui), de son accident qui le cloue aujourd’hui dans un fauteuil roulant, de son enfance, de ses frasques et de ses addictions, de ses collaborations artistiques (avec Sinead O’Connor ou Nick Cave) … C’est pas la matière qui manque, le tout asséné d’une voix rauque et marmonnante, entrecoupée de rires raclants, avec une (légère ?) dose d’éthanol dans le sang.
Sorti l’an dernier outre-Manche, Crock of Gold est enfin diffusé dans les salles françaises, notamment sur les écrans du Cinéma Utopia, à partir du 21 juin. Nova Bordeaux vous offre vos billets pour cette alternative salvatrice à la (dé)Fête de la Musique. Pour piocher dans le chaudron d’or au pied de l’arc-en-ciel du Nova Aime, ça se passe JUSTE ICI.
Crock of Gold, le lundi 21 juin à 18h00 @ Cinéma Utopia (Bordeaux).