Un nouvel organe de presse, lancé par des proches de la France Insoumise.
Ce mercredi, la presse était conviée à la deuxième phase de lancement de Le Média. Une webtélé initiée par des proches de la France Insoumise, « engagée et populaire », décrite dans un manifeste publié dans Le Monde fin septembre comme une « coopérative indépendante, pluraliste, humaniste et antiraciste, féministe, écologiste et progressiste ».
« On veut des questions incisives » lance tout sourire Gérard Miller, cofondateur du projet, alors que les journalistes s’installent. « Enfin, on en a qu’une, est-ce que Le Média est le média de Mélenchon ? » répond sur le même ton, Sophia Chikirou, elle aussi cofondatrice. Parce que oui, en même temps, c’est cette question qui titille l’opinion depuis deux semaines. Puisqu’il s’agit à travers ce média de défendre le pluralisme et l’indépendance, même s’il a été imaginé par des personnes qui soutiennent de manière plus ou moins active le parti politique lancé par Jean-Luc Mélenchon, la France Insoumise. Cette question, Gérard Miller s’y attaque d’ailleurs dès le début de la conférence de presse :
« Il faudra nous juger sur pièce, pour savoir si l’on peut être engagé sur des valeurs et être pluraliste »
L’aventure Le Média est lancée le 25 septembre dernier, avec la parution du fameux manifeste « Pour un nouveau média citoyen » dans Le Monde. De nombreuses personnalités ont rapidement montré leur soutien au projet. Philippe Poutou, Eva Joly, Josiane Balasko, Noël Mamère, Aurélie Filippetti et Arnaud Montebourg parmi eux.
Mediapart souligne tout de même dans une enquête : « sur les 107 personnalités mises en avant dans le cadre d’une pétition soutenant la création de cette télévision en ligne et ayant signé la charte, 57 d’entre elles ont un lien avéré avec La France insoumise. » On apprend également dans ce même papier que Jean-Luc Mélenchon a envoyé un mail à l’ensemble des membres de La France insoumise pour « leur demander de soutenir le futur site d’informations. »
Mais les quatre fondateurs du Média ne dissimulent pas leur engagement. Au contraire, ils le revendiquent. Pour eux, l’objectivité n’existe pas – encore moins dans les milieux journalistiques – la subjectivité n’est pas un mal, tant qu’elle est pratiquée avec honnêteté.
Le grand mal de l’information, ce serait les actionnaires, dont neuf « dominent 90% des médias français » affirme Gérard Miller. « C’est d’abord un média citoyen, il n’est pas initié par des gens qui ont un but politique précis » poursuit Sophia Chikirou. Son modèle de financement sera basé sur l’abonnement et non pas sur la publicité. Les investisseurs du média, surnommés les « socios », devront payer un droit d’entrée – un genre d’action – d’une valeur de 5 euros. « Le socio peut en acheter 500 maximum » explique Sophia Chikirou, « en plus du droit d’entrée, il y a aura une contribution soit annuelle, soit mensualisée, en fonction des revenus, sur le principe de solidarité : ceux qui ont le plus, paient le plus. »
« On reprendra les codes des journaux télévisés »
Concernant le contenu même de ce média, il sera mis en forme par une équipe de 10 journalistes, qui seront recrutés à partir de début novembre. Le Média prendra la forme d’un journal télévisé diffusé en direct sur Youtube chaque soir à 20h. Lancement prévu le 15 janvier 2018.
Cette fois, c’est Aude Rossigneux, rédactrice en chef du média, ancienne grand reporter, qui prend la parole : « On reprendra les codes des journaux télévisés (…) Les titres, ce qui s’est passé, la météo, le sport, les faits divers, tout sera balayé », le tout en se laissant le temps de préparer leurs sujets, « on a envie de pouvoir aller au fond des choses, apporter de la pédagogie, du fond, là où va beaucoup trop vite. »
Le Média se laissera libre de parler de tout, d’écologie, de féminisme, de la lutte contre le racisme, mais pas avec tous. L’extrême droite n’y aura pas sa place, « c’est notre seule limite » précise Gérard Miller.
La question persiste tout de même. Le Média sera-t-il libre d’aborder tous les sujets, toutes les affaires, même celles concernant un parti politique soutenu par ses fondateurs ? Gérard Miller l’affirme. Dans la salle, le doute plane quand même.
Visuel : © Morane Aubert