Dans le monde entier, le Coronavirus montre les côtés les plus négatifs de nos voisins, prêts à dénoncer ceux qui ne restent pas confinés.
Les règles sont les règles. Et pour certaines personnes, ne pas les respecter les poussent à dénoncer ceux qui s’y opposent. Alors, la France est-elle un pays de balance ? Réponse avec Thomas Zribi dans La Grasse Matinale d’Armel Hemme.
L’information a été communiquée il y a quelques jours par L’Ami du 20ème : Journal du 20e arrondissement de Paris. « La préfecture de police nous informe recevoir de nombreux appels concernant le non-respect des mesures de confinement. Il est demandé de ne pas appeler le 17, cela sature le système des appels d’urgence ». Pour résumer : de nombreuses personnes téléphonent à la police pour dénoncer les voisins qui sortent, qui se parlent de trop près, ou pire, qui laissent leurs enfants jouer dehors.
Allô la Police ? Mes voisins font un barbecue dehors. Ils sont trois.
Et ce n’est pas une spécificité parisienne. À Nantes, il se passe la même chose. Le journal Ouest-France raconte le ras-le-bol des policiers qui reçoivent plein de coups de fil de dénonciation. C’est la même chose à Lille, où le standard croule sous les appels de bons citoyens qui dénoncent les mauvais. Et c’est encore la même chose dans des petites villes comme Fougères, en Bretagne, où les policiers racontent qu’on les appelle par exemple, car des voisins sont à trois dans un jardin à faire un barbecue.
Tout cela sans qu’aucun appel à la dénonciation n’ait été lancé par les autorités, au contraire. Et ne parlons même pas des litres de délation que l’on trouve sur les réseaux sociaux.
Peut-être que cette vieille habitude française est utile après tout : nous sommes, semble-t-il, indisciplinés, ce qui fait ricaner les Allemands qui eux respectent les règles sans même qu’on les oblige à rester chez eux.
Mais autant d’enthousiasme pour dénoncer les voisins, ce n’est pas génial non plus et ça rappelle des mauvais souvenirs. Et là au moins les Allemands se taisent. Il n’y a pas de quoi faire les malins.
Alors posons la question qui fâche : la France est-elle intrinsèquement un pays de poukave comme on dit chez les anciens jeunes ? Ou de balance comme on dit chez les vieux ? La réponse est non, et on ne sait pas si c’est rassurant ou encore plus angoissant.
Certaines régions ont mis en place un mécanisme de délation.
Au Canada, la police s’habitue également à recevoir de nombreuses dénonciations de gens qui se rassemblent malgré les consignes. Hier, le gouvernement colombien a lui annoncé ouvrir une page sur Internet où l’on pourra dénoncer, anonymement ou non, les étrangers qui auraient pénétré leur territoire. Mais c’est surtout en Chine que ce système a été poussé au maximum. Au plus fort de l’épidémie, certaines régions ont mis en place un mécanisme de délation organisé et rémunéré par les autorités.
En Chine, une prime à 250 euros
Dans la province de Hebei près de Pékin, le journaliste Sébastien Le Belzic a expliqué qu’une prime de 250 euros était offerte à ceux qui dénonçaient les visiteurs venus du Wuhan, foyer de l’épidémie. Par la suite, les méchants contaminés étaient cloitrés chez eux, et leurs gentils voisins se chargeaient de clouer des planches sur la porte pour les empêcher de sortir.
C’est ça l’intérêt de lire les journaux, c’est souvent pire ailleurs.
Visuel © Getty Images / Stéphane Cardinale