Cinéma, street art, littérature, musique : avec Biarritz Amérique Latine, la culture latino prend ses quartiers en terre basque.
Proximité frontalière oblige, l’espagnol est une seconde langue quasi-naturelle à Biarritz. Une semaine par an, fin septembre, elle y est aussi celle des images lorsque le Festival Biarritz Amérique Latine s’empare de la ville. Vingt-deux ans que ça dure et donc un penchant pour la prémonition : à ses débuts personne n’aurait vraiment misé un kopeck sur la production chilienne, argentine, uruguayienne ou péruvienne, aujourd’hui le cinéma latino est un des plus prolifiques, attirant des co-producteurs du monde entier, glanant les prix les plus prestigieux (rien que la semaine dernière au festival de San Sebastian, le Cannes espagnol, un film vénézuélien – Pelo Malo– un mexicain –Club sandwich– et un brésilien – A lobo atras da porta– ont décroché le mat de cocagne au palmarès.
Le festival Biarritz Amérique Latine est devenu peu à peu LE rendez-vous français de référence en la matière, l’occasion d’un panorama copieux – longs-métrages, courts-métrages, documentaires, fictions…- prenant la température d’un cinéma foisonnant. En témoigne la programmation du cru 2013, ouverte à tous les registres du pur film de genre au feel-good movie familial. (tout) petit tour d’horizon des riches festivités à venir, avec notre sélection maison.
RIO 2096 : Uma historia de amor et furia.
Un Roméo et Juliette sur fond de lutte des classes au gré de six cents ans d’histoire du Brésil ne peut pas être un projet banal. Encore moins quand il s’agit d’un dessin animé, sous influence japanimation. Ou en n’ayant pas froid aux yeux pour raconter la colonisation, le régime militaire et envisager un futur répressif. Quelque part entre Highlander et les Frères Wachowski.
Elena
Une brésilienne à la recherche de sa soeur aînée partie à New York. Pas loin d’une chronique familiale à la Tarnation (ce documentaire est un collage à partir d’images d’archives personnelles), en peut être encore plus poignant par l’esquisse d’une construction de soi impossible quand certaines pièces du puzzle sont irrémédiablement manquantes.
Victor Jara, N°2547
Parmi les victimes du coup d’état de 1973 au Chili, Victor Jara, chanteur engagé, un fonctionnaire refuse que son corps soit mis en fosse commune, et se lance dans un combat pour le faire enterrer légalement. Quand les rouages de l’administration et le travail de mémoire se confrontent.
El Tio
Ici, le nom de Jaime Guzman Errazuriz ne dit pas grand chose, au Chili, personne n’a oublié ce conseiller du général Pinochet. El Tio imagine que son neveu tente de monter une pièce autour de l’ascension de ce trouble personnage. L’exorcisme d’un drame national vire à la mise en abyme lorsque la plupart des acteurs de ce film y jouent leur propres rôles. Du Costa-Gavras remixé par un concept vertigineux.
Las horas muertas
Le Mexique ne se résume pas aux cartels, Ciudad Juarez et ses disparus L’ambiance de Las horas muertas est beaucoup plus paisible : un ado s’y retrouve à l’accueil d’un motel pour rencontres furtives et adultérines. Décomplexé mais avant tout tendre, un récit d’éducation sentimental très attachant.
Workers
Rafael et Lidia se sont fait niquer par le systeme : le balayeur se retrouve privé de retraite, la domestique découvre que sa richissime employeuse lègue sa fortune à son chien. Comment lutter ? Workers offre une revanche au lumpenprolétariat, rendant coup pour coup, mais avec le sourire.
Et si ça ne suffisait pas à se rassasier de culture latino, il sera toujours temps entre deux séances de se rendre au village du festival, pour voir l’avancée de la fresque que réaliseront au long de la semaine Cekis et Inti Castro, deux graffeurs chiliens ou se plonger dans les oeuvres de Roberto Bolano, Antonio Ungar et Valeria Luiselli, fine fleur de la littérature contemporaine latino. Le tout au son de Tambores Bago, la batucada du Nordeste ou de la Tipica Sanata qui fait se croiser tango et human beat box.
Jusqu’au dimanche 6 octobre, à Biarritz
http://www.festivaldebiarritz.com