Avant de recevoir Joe Hisaishi en février, l’Auditorium de l’ONB accueille un autre artiste qui vaut le détour, et bien davantage encore : l’oudiste et chanteur tunisien Dhafer bin Youssef bin Tahar Maarref, alias Dhafer Youssef. Héritier d’une famille de muezzins, ce musicien qui s’est épanoui entre Tunis, Vienne et New-York a tout d’un légataire passionné de cet esprit qui transcende les frontières et redessine les arpentages – sono mondiale et néo géo tout à la fois, le gonze. Si bien qu’il n’y a pas si longtemps, par l’entremise d’Isadora Dartial, Nova s’aventurait dans ses oreilles – une émission à réécouter ici.
« Figurez-vous qu’elle était debout leur ville ». Mais pas de ces gratte-ciels qui ébahissait le Bardamu célinien, mais d’autres hauteurs, d’autres beffroi, d’autres belvédères, des Streets of Minarets érigées comme autant de villes imaginaires, de stations fantas(ma)tiques d’un voyage musical reliant Orient et Occident – tantôt chez l’un, tantôt chez l’autre et souvent chez les deux à la fois – faisant apprécier une savante mécanique de jazz, d’électronica, de chant soufi, d’inspirations Bollywood, d’improvisation et de poésie multiséculaire.
Le tout sur des rythmes impairs qu’affectionne Dhafer Youssef, plus complexes mais aussi plus propices à ouvrir vers d’autres univers. Et, en guise de personnel naviguant, du beau linge, à commencer par Herbie Hancock derrière sa batterie, Ambrose Akinmusire à la trompette ou toute la dextérité d’un Marcus Miller sur les quatre cordes de la basse.
« Figurez-vous qu’elle était debout leur ville » : oui, standing ovation attendue après la merveilleuse compulsion ce nouveau recueil de beauté et d’étrangeté (suivant le titre d’un de ses précédents albums, Diwan of Beauty and Odd) paraphé, live, par ce Dhafer d’enfer.
Dhafer Youssef, le jeudi 23 janvier à 20h @ Auditorium de l’ONB (Bordeaux).