En Normandie, cette musicienne mystique tisse un avenir hybride où la soie sortira de nos bouches à chaque phrase prononcée. Finis les mots creux, les expressions vides, type « enfourcher le tigre ».
« On court, on coule / on croule, sous nos poids. » Sur son dernier album sorti en octobre, Sous la lune, Élodie Milo invite à écouter « les louves qui hurlent en nous » via six incantations fort sabbatiques teintées de guitares surf, de pop songeuse ou de rythmiques sud-américaines, écrites et composées pour « explorer de puissants archétypes féminins » : la vierge, la sorcière, la maman ou la putain. Quelques jours avant le confinement, elle présentait à Besançon la première de son spectacle Lunas, mélange de théâtre et de chansons, d’humour et de féminisme, cabaret barré élaboré au diapason des quatre phases du cycle menstruel, conçu avec la danseuse Delphine Dartus et mis en scène par Loïc Deschamps.
« Elle a le serpent qui change de peau, l’aigle qui plane là-haut / Chant de la terre, de l’air, de l’eau. » Toujours recluse dans un cocon forestier de Basse-Normandie, cette musicienne et comédienne parisienne tisse un avenir hybride où la soie sortira de nos bouches à chaque phrase prononcée, formant une toile étroitement liée aux formules utilisées. Je te dirai les mots creux, les mots qu’on dit sans se regarder dans les yeux ? Non. Fini les mots laids, les expressions vides, type « je suis au bout de ma vie », « du coup », « challenger » ou « enfourcher le tigre », indignes d’être salivés. Ce qu’Elodie Milo nous conte avec malice, avant d’entonner une authentique chanson des tisseuses du XIIIe siècle, puis de s’élancer vers le générique d’un super-feuilleton des années 60. Comme disait l’oncle de Peter Parker : un grand pouvoir implique de grandes responsabilités.
Pour écouter son album Sous la lune, c’est ici.
Pour écouter la précédente utopie d’Élodie dans L’Arche de Nova, où il était question de la rencontre fortuite entre l’odieux Bolsonaro, une chamane nonagénaire et un arbre sacré, c’est là.
Visuel © Arac Attack – le monstre à huit pattes, d’Ellory Elkayem (2001).