Rencontre avec les auteurs de la Web-Série.
En passant pécho, ça a été le vrai bol d’air du web, un truc attendu depuis longtemps, loin d’une utilisation d’internet de plus en plus aseptisée et qui ressemble désormais à la télé. Un programme court sur internet dont on ne dénombre que 4 épisodes et qui pourtant connait déjà une sacrée résonnance. Et ce pour une simple raison, le ton, la créativité et les sujets qui parlent à ceux qui font le web et qui trouvent là quelque chose de naturel, qui leur ressemble vraiment et qui n’est pas conçu pour être censé leur ressembler… Et c’est cette nuance qui nous a poussé à rencontrer Ken et Ryu, les deux auteurs de la série. Entetien barré mais sérieux.
Et pour les soutenir le lien My Major Company est là.
Comment s’est passé la rencontre de toute l’équipe, qu’est ce qui vous a amené à travailler ensemble et quelles ont été vos expériences préalables au concept d’En Passant Pécho?
K&R: On s’est tous rencontrés à Urban Peace. C’est d’ailleurs Nassim (aka Cokeman) qui s’est pris la bouteille de Jack de Booba en pleine tête. Bon il l’avait pas volé…
Quelle a été la source d’inspiration de l’univers et de l’atmosphère de la série ?
K&R: Salma Hayek.
Comment se passe le processus d’écriture, y a t’il une grande part laissée à l’improvisation ?
K&R: On écrit tout, après on rigole. On fait lire aux comédiens, ils rajoutent des choses et on rigole encore plus. Le processus est différent pour chaque comédien. Pour Hedi par exemple, il n’est jamais aussi bon que lorsque le dialogue est écrit au cordeau. Avec Nassim, on attend à chaque fois de lui qu’il explose nos dialogues. Quant à Pablo, il nous propose toujours énormément de variations et on n’a plus qu’à choisir au montage.
Comment est ce que vous comptez vous renouveler, continuer à apporter des nuances au sein de l’univers d’En passant Pécho ?
K&R: On commence à peine à le traiter l’univers En Passant Pécho, il est encore très large. Il y a encore plein d’histoires à raconter avec Cokeman, Hedi, Mireille ou Quibron. Mais aussi plein de nouveaux personnages à ajouter. T’aimerais bien savoir à quoi il ressemble le père de Cokeman non?
Il se dégage de l’humour et des thèmes des épisodes ainsi que du vocabulaire employé, un sentiment (assez rare) d’enfin voir un programme qui parle à notre génération (20 -30 ans). Est ce que c’était quelque chose de voulu à priori où vous avez juste façonné une série à votre image ?
K&R: Déjà merci c’est cool, c’est le genre de retour qu’on espérait avoir depuis le premier épisode. On voulait créer une série qu’on aurait kiffé voir. On est les créateurs mais on est aussi le premier public. Le plus grand fan de Nassim c’est nous. Après notre devise de départ c’était « censurable-indiffusable », la télé n’aurait jamais voulu de nous. On doit tout à internet, c’est le seul média qui nous permet de rester authentique, donc de pouvoir être en phase avec la jeunesse d’aujourd’hui.
Il y a beaucoup de clins d’oeil à la musique dans les épisodes, Le générique de Set et Match, la casquette la Ride, et on a aussi pu croiser certains des acteurs au concert d’Espiiem et de Kema, et vous organisez aussi des soirées, vous gravitez donc dans un environnement de création assez large est-ce que cela a une importance ? Et quel rôle joue la musique dans votre univers ?
K&R: Les soirées EPP c’est vraiment mortel, et en plus c’est important pour nous. C’est le seul moment où l’on peut réellement rencontrer notre public. C’est incroyable de voir une salle entière se marrer à des vannes que t’as écrit trois mois avant, en te demandant si c’était golri. On imagine pas ces soirées sans concert, sans bordel. Et t’as déjà vu un bordel sans musique toi? Quand tu ramènes AP&RimK à une soirée EPP pour chanter « Demain, j’arrêtes pas », tu sais que les gens vont partir en couille. Et c’est le genre de privilège que le succès de la série permet, on va pas s’en priver.
L’aspect Do IT Yourself des productions confère quelque chose d’attachant à En Passant Pécho, est ce que la levée de fonds effectuée sur My Major Company va changer votre façon de procéder et de travailler ?
K&R: On a toujours essayé de faire les choses le mieux possible avec ou sans argent. Mais ça nous intéresse pas de faire du sur place, on veut toujours mettre une tarte plus forte que la précédente. C’est ce que les gens ont du mal à comprendre lorsqu’on demande autant d’argent sur My Major Company. Nous notre volonté c’est de faire un truc qui n’a jamais été fait et dont on se souviendra. EPP ne génère pas d’argent, rien ne nous encourage à continuer en termes financiers. Mais on kiffe beaucoup trop écrire et tourner ces conneries.
Et on travaille pas gratos, la barre de rire c’est quand même un putain de salaire.
L’humour Youtube tel qu’il a été repris par les grands médias (Norman Cyprien etc) est devenu un format presque périmé ou du moins redondant, c’était quelque chose contre lequel vous vouliez déjà vous inscrire dès le début ?
K&R: Déjà on est dans un autre format que celui des Youtubeurs classiques. Nous y’a toute une équipe derrière, beaucoup de prépa, plus de moyens etc… Je ne sais pas pour Cyprien, mais de notre côté, nous avons de vraies ambitions de mise en scène, de direction d’acteur, de découpage ou de recherche esthétique.
Pour nous, l’histoire de ces youtubeurs, c’est un mec golri, Norman, qui s’est chauffé pour faire des vidéos qui ont fait marrer tout le monde. Ses potes ont gratté, avec moins de réussite, mais vu qu’ils étaient les seuls à se chauffer c’est devenu la « génération Y ». La « génération Y » mes couilles ouais! Et le gros problème selon nous, c’est que des chaînes comme Canal +, en soif de clics, vient chercher ces mecs là. Et on se retrouve avec « pendant ce temps » (c’est quand même une série qui tourne sur 1 seul plan, et en plus ça a été pompé à 100% sur un programme US) et les « Tutos » de Jérome Niel. Wesh les gars y’a 10 – 15 ans vous sortiez les Lascars, le cinéma de Jamel, Omar & Fred, H, le Burger Quizz etc… C’est comment la perte de Mojo?
L’idée de vouloir vous financer par un projet de crowdfunding participe aussi de cette volonté d’indépendance de ne pas être rattrapé et de voir son contenu guidé ?
K&R: En ce moment c’est pas une volonté d’indépendance, on est juste déterminés à tourner. Pour un producteur classique, c’est compliqué d’investir dans une série qui ne lui rapportera que dalle. Demander de l’argent aux spectateurs, c’est avant tout une responsabilité plus grande vis-à-vis d’eux. T’imagines la gueule du mec qui a craché 250 balles si on sort de la merde? Pour nous ça va on montre pas nos visages, mais imagine Nassim ou Quibron, ils vont prendre beaucoup trop cher!