Retour aux bonnes habitudes. Quand vient la rentrée, septembre le mois des affairé.es, la saison des cartables, tramways et mails non lus, le Festival Climax ressurgit lui aussi dans les agendas, au coeur de l’Espace Darwin, cet écosystème « à la berlinoise » où la Radio Nova a fait halte il y a quelques semaines, à l’occasion d’une étape de la « Grande Tournée » estivale (une émission à réécouter en podcast ici). Au programme, inchangé, de Climax : une flopée de concert et surtout, légitime pivot du rendez-vous de la rive droite garonnaise, une myriade de rencontres, d’échanges et de conférences abordant quelques-unes des questions écologiques les plus prépondérantes de l’heure.
Lors de cette huitième édition, c’est l’eau qui sera le sujet central des discussions. Un sujet majeur, et d’une sinistre actualité, après un interminable été de canicules, d’incendies et de sècheresses extrêmes, sans la moindre goutte de pluie : alerte rouge sur toute la France et l’Europe (voyez dans la plaine du Pô) dès le mois de mai, fleuves à sec, sols craquelés, cultures assoiffées, nappes phréatiques à l’agonie. Des phénomènes aberrants, catastrophiques, possibles pages de garde d’un « avenir en train de s’évaporer sous nos yeux », dixit cette interview de Florence Habets, hydro-climatologue du CNRS, au micro du « Nova Jour se Lève ».
« Par son absence ou par son trop-plein, explique le festival en préambule, l’eau est au cœur de la plupart des catastrophes naturelles, entraînant dans son sillage pénuries, famines, inégalités, érosion massive de la biodiversité, conflits, migrations, etc. » Autant dire qu’il y a plus qu’intérêt à se soucier de ce sujet-là – aqua, ça sert -, de cet or bleu si vital, ce que soulignera, à ce Climax #8, l’hydrologue Emma Haziza, qui tire tous les signaux d’alarme possibles depuis de nombreuses années.
Parmi les options possibles : faire tomber le glaive de la justice. Une idée que poursuivra une audience simulée, avec plaidoiries, jurés, témoignages à la barre et tout le tremblement d’un tribunal afin de s’interroger sur la possibilité de donner un statut juridique aux fleuves français – de la Garonne toute proche au Maroni guyanais subissant l’orpaillage illégal, en passant par le Rhône pollué par le « couloir de la chimie » – pour préserver leurs biotopes, leurs bienfaits, leur intégrité naturelle. Le tout sur le modèle du fleuve Whanganui en Nouvelle-Zélande, reconnu en 2017 comme « entité vivante » après plus de 150 ans de batailles acharnées, qu’évoquera en experte la docteure maorie Erena Rangimarie Rere Omaki Ransfield-Rhöse.
Lors de ces trois jours, les festivalier.es aux verts neurones auront droit, au fil de l’eau, à toute une batterie de conférences et d’interventions pertinentes – de la part du photographe spécialiste des mondes sous-marins Greg Lecoeur, de l’avocate Marine Calmet, fondatrice de l’école Wild Legal, ou d’Autumn Peltier, militante autochtone canadienne du droit à l’eau.
Des projections de films sont également prévues dans l’agenda, à commencer par la série documentaire Un Monde Nouveau de Cyril Dion, qui sera présent pour accompagner ce dévoilement en avant-première. Un retour bordelais pour le chantre écolo après sa venue en 2018. Retour à Climax, aussi, pour le cacique amérindien Raoni, grand défenseur d’une forêt amazonienne plus menacée que jamais (merci Jaïr, les lobbys de la viande, du pétrole et leurs affidé.es), qui recevra les honneurs du festival pour son engagement sans relâche, jusqu’à aujourd’hui, à 90 ans passés.
En parallèle de ces rendez-vous, une cinquantaine d’associations et d’ONG (parmi lesquelles SOS Méditerranée, Greenpeace, RESF, Extinction Rebellion, L214, etc.) auront portes ouvertes et carte blanche sur les lieux, regroupées au sein d’un « village activiste », où vous pourrez déambuler à loisir, vous initier, vous adonner à des ateliers qui feront oeuvre de sensibilisation pour vous entraîner à l’action, qu’elle soit à petite ou à grande échelle. De la cogitation donc, mais aussi de l’agitation à prévoir, nécessaire.
Agitation qui sera aussi musicale. Car, s’il paraît qu’on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre, le corollaire à l’encre sympathique spécifie sans doute qu’on peut attirer plus d’un.e novaïen.ne avec de la musique. Pas n’importe laquelle, évidemment. Mais un grand mix d’exubérances de dancefloor, de psyché-pop 60s, de relève hip-hop, de tubes à essais exfiltrés d’un laboratoire synthétique, d’habitué.es de l’antenne, de riffs, de groove, tout ça panaché et arrangé comme à la parade, voilà qui mérite quelques détails supplémentaires, une petite revue d’effectif.
On y devine Molécule, par exemple, l’électronicien français qui croise sonorités synth-pop et démarche conceptuelle avec ses enregistrements de terrain, ce fameux field recording ; des miscellanées de sonorités environnementales amassées lorsqu’il passe, par-dessus l’habit du musicien, celui de l’explorateur, sur un chalutier atlantique ou au beau milieu du Groënland.
Molécule ayant aventuré ses atomes chez Ed Banger, signalons que le patron du label phare des French Touch 2.0, 3.0, ad lib, sera aussi de la partie. Un Pedro Winter, alias Busy P, coiffant la casaque du disc-jockey pour orchestrer un tour de manège à bride abattue qui ne vous laissera pas de bois, galopant de nouveautés en exhumations, empruntant les classiques house comme les contre-allées rap, funk et techno, pour une grande session plaisir des oreilles et des guiboles.
Autre amie de la maison (où elle a longtemps animé les « Nova Mix Club »), Piu Piu, cofondatrice du collectif Good Sisters, passera malaxer devant les Technics la matière brute des sons, histoire de jouer bien davantage que les filles de l’air, de même que la Palestinienne Sama’ Abdulhadi, fiévreuse figure de l’underground techno moyen-oriental, que les noctambules girondin.es à l’affût ont pu découvrir en septembre dernier lors d’une soirée hors-série des InsolAntes – ou, quelques années plus tôt, sur nos ondes, lorsqu’elle arborait encore son alias SkyWalker.
Moins versé dans les platines que dans les guitares rock, les mellotrons et les voix à se déchirer, le Bordelais Arthur Satàn se fendra, lui, de ses bonnes adresses mélodiques, des coordonnées situées, suivant le titre de son album solo, So Far So Good. « C’est loin, mais c’est beau », comme dirait un président que n’a pas encore vilipendé Marc Rebillet ; de la pop lumineuse, à la fois lo-fi et chiadée (l’un n’empêchant pas l’autre), tracée suivant les patrons anglo-saxons des 60s, évoquant Donovan, Zombies ou les Beatles avec une facilité telle que c’est à croire qu’il suffit de traverser la rue…
Pour compléter notre jeu déjà riche en bonnes pioches, on pourrait évoquer La Famille Maraboutage, pléthorique smala marseillaise (qui sera aussi au Queen Classic Surf Festival quelques jours plus tôt), dont les réunions sont autant de prétextes à secouer l’assistance avec leur étourdissante variation du Djeuze Grou – ce serpent de mer afro cher à Ishmael Reed.
Mais il convient de ne pas omettre, non plus, la présence du MC val-de-marnais La Fève, rappeur qui a roulé sa bosse sur Soundcloud avant de franchir le Rubicon avec son ami beatmaker Kosei, pour une poignée de danses des morts dont le style devrait bientôt conduire à son couronnement imminent parmi la foule de ses condisciples – un vrai Roi (Créteil) Soleil en devenir.
Climax, comme chaque année : un stimulant weekend regorgeant de sollicitations musicales, intellectuelles et écologiques en toutes sortes. Nova Bordeaux vous offre des tickets d’or pour l’ensemble de cette huitième édition. Pour les empocher, il suffit de compléter le formulaire ci-dessous avec le mot de passe Nova Aime.