Réapparition d’un sidérant film-somme oublié, l’adaptation du roman de Tolstoï taille de sacrées croupières au récent biopic de Napoléon.
Il aura suffi du biopic que Ridley Scott a consacré à Bonaparte pour que la Napoleonmania se réactive. Ce n’est pourtant pas le premier film d’ampleur qui est consacré à l’Empereur. En 1966, sortait même le plus impérial du lot. Pas tant parce qu’il s’agissait d’une adaptation du plus connu des romans de Léon Tolstoï, ni parce qu’il allait être accompagné de tous les superlatifs, de son budget faramineux qui, même converti en monnaie actuelle, ferait passer un blockbuster Marvel d’aujourd’hui pour un film indépendant à sa durée colossale, outrepassant les sept heures. Monument de production, « Guerre et paix » en est aussi un de cinéma.
De son introduction quasi expérimentale, impensable pour son statut de fresque populaire commandée par le Kremlin, à ses scènes de bataille réinventant déjà le cinéma immersif en passant par la peinture opératique des raouts de l’aristocratie, cette évocation de la campagne de Russie sidère dans son alliance d’uber-spectacle et d’intime. « Guerre et paix » a l’ambition folle d’une vision à la fois concrète et symbolique d’une fin de règne. La puissance de la fiction et la démesure de l’Histoire avec un grand H achevant de faire du film de Sergeï Bondartchouk une des dernières grandes épopées du cinéma soviétique, aussi grand public qu’introspective. Cinquante-sept ans plus tard, elle réapparait, en salle, mais aussi dans un fastueux coffret Blu-ray, accompagnée d’un passionnant livre, ce serait vraiment connaître une bérézina de spectateur de ne pas découvrir ou redécouvrir cette saga pharaonique Napoléon est peut-être mort à Sainte-Hélène mais c’est ce film fou ou se disputent gigantisme et lyrisme qui l’a enterré.
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