Et réédite un disque du « James Brown soudanais ».
L’an dernier, Jannis Stürtz, fondateur du projet Habibi Funk (c’est-à-dire, « Funk chéri »), sortait Muslims & Christians, une rétrospective qu’il consacrait alors à Kamal Keila, le « James Brown soudanais » qui redécouvrait, cinquante ans après, cette figure fondamentale du funk à la soudanaise.
Cette année, le Berlinois, qui s’est spécialisé depuis le lancement d’Habibi Funk dans l’exhumation et la réédition d’artistes tombés dans l’oubli (Al Massrieen, Ahmed Malek, Raze de Soare, Dalton…), rendant ainsi hommage depuis plusieurs années à la musique funk ayant émergée dans le « monde arabe » au sens très large, se replonge tout particulièrement dans la musique venue du Soudan.
Ma première connexion consciente avec la musique soudanaise
Il ressort ainsi aujourd’hui l’album de The Scorpions, un groupe emmené par le chanteur Abu Bakr (« jalon », nous dit-on, « de la scène jazz des années 80 »). Jannis Stürtz : « Cet album a été ma première connexion consciente avec la musique soudanaise. Habibi Funk devait exister depuis un an mais je n’étais encore tombé sur aucun enregistrement du Soudan qui correspondait à ce que je cherche à faire avec le label. Je me souviens avoir fait quelques recherches rapides suite à ces enchères (que je n’ai évidemment pas remportées) afin de réunir des informations au sujet du groupe mais je n’avais rien trouvé de significatif. Dans la plupart des histoires de la musique soudanaise, The Scorpions n‘apparaissent qu’en note de bas de page.
Comment est-ce possible ? Je ne sais vraiment pas. Pour moi, leur musique est une combinaison unique : des arrangements de cuivres incroyablement puissants, un batteur vigoureux qui donne une base rythmique funky à l’ensemble et Saif qui fait le lien entre ces éléments. Le résultat oscille entre des morceaux instrumentaux qui rappellent les B.O. de films noirs des années 70 et d’autres davantage ancrés dans la tradition soudanaise, beaucoup d’entre eux sont des versions modernisées de rythmes traditionnels des différentes régions du pays, et il y a même une incursion dans le Soukous congolais. Alors que toutes nos sorties jusqu’ici ont été imaginées comme des compilations avec une sélection de nos titres préférés d’un artiste, cet album est notre première réédition stricto-sensu, tout simplement parce que la qualité de l’album n’est altérée par aucun morceau. Avec ses influences très éclectiques, c’est un album à nul autre pareil et un modèle pour ce que nous essayons de faire avec Habibi Funk. Plus tard, en 2017, j’organise mon premier voyage au Soudan pour finaliser les détails d’un disque, encore à paraître, de Sharhabeel Ahmed. Deux amis autrichiens, reviennent tout juste de Khartoum où ils ont rencontré Ali Dokka dans l’une des toutes dernières salles de concert de la ville. Ali y joue une fois par semaine avec son groupe, The Blue Stars. »
L’album en question sort le 9 novembre sur Habibi Funk. Mais comme on a beaucoup de chance, on vous dévoile en exclusivité un extrait de ce jazz presque mythique des années 80, avec le précieux Saif Abu Bakr à la baguette.
Visuel : (c) Habibi Funk