Gaspard Augé et Xavier de Rosnay ont enregistré une version live de leur album « Woman WorldWide ». Projection au ciné, fin août.
En 1971, les Pink Floyd, qui sont alors en pleine préparation de ce qui deviendra leur grand chef-d’œuvre (The Dark Side of the Moon, 1973), enregistrent l’un des concerts les plus célèbres de toute l’histoire de la musique rock. Célèbre, parce qu’il a lieu dans le fameux amphithéâtre antique romain de Pompéi, là où les gladiateurs, jadis, combattaient avec l’espoir d’obtenir, de la part de celui qui décidait, un pouce levé haut dans le ciel. Célèbre aussi, et surtout peut-être, parce que ce live-là avait alors été enregistré… sans public. Un film en forme d’« anti-Woodstock », comme l’a dit à l’époque le réalisateur du film Adrian Maben, qui voulait ainsi concentrer l’attention du spectateur non pas sur les interactions du groupe avec un public en furie et en sueur, mais plutôt, sur l’interprétation de la musique elle-même. C’est la première fois qu’un groupe de cette envergure se lançait dans pareille entreprise.
En 2019, loin de Pompéi, c’est au tour du duo Justice (Gaspard Augé et Xavier de Rosnay), qui associe depuis plus de dix ans les idées de musiques électroniques et de musiques rock, de proposer l’enregistrement d’un live sans le moindre public pour y assister. L’idée ? Prendre les composantes de l’album Woman Worldwide (2018), réinterprétation « live » des morceaux issus des albums † (Cross), Audio, Video, Disco et Woman, et l’adapter à l’écran. Il y a quelques semaines, lors d’une projection privée proposant la diffusion du live (IRIS : A Space Opera by Justice, c’est son nom), Xavier de Rosnay expliquait : « On a toujours essayé de faire des captations vidéos complètes de nos lives. Et on n’a jamais été content du résultat. Retirer le public, ça nous permettait de nous concentrer exclusivement sur la musique et sur le live en lui-même ».
Là où le Pink Floyd : Live at Pompeii proposait un saut vertigineux dans un passé vétuste depuis longtemps (surtout à Pompéi, dans une région marquée par le fantasme du Vésuve dangereux qui peut entrer en éruption à tout moment), IRIS : A Space Opera by Justice semble au contraire proposer un saut dans le futur. L’esthétique visuelle du film, comme l’atteste cette bande-annonce qui vient d’être dévoilée et où l’on peut entendre quelques notes du titre « Stress », rappelle davantage l’intérieur des engins spatiaux omniprésents dans la culture SF que les ruines d’un monde enseveli sous la lave des volcans.
La grande spécificité de ce projet-là ? Le film n’est réservé qu’au cinéma (pour le moment…), avec un système son quasiment semblable à ce qui est proposé lors d’un concert disons, plus traditionnel. Ok, mais Justice avait déjà fait le coup avec les albums lives A Cross the Universe et Access All Arenas ? Ceux qui auront l’occasion de se déplacer au ciné à la fin du mois d’août saisiront la différence, d’un point de vue sonore, entre un concert capté en public et un concert capté sans aucun autre murmure que celui des machines.
Le 29 août, 20h30 : c’est la date à cocher dans votre agenda si vous faites partie des fans (vous êtes nombreux dans ce cas) de Justice ou que vous êtes, tout simplement, fans de ce qui est singulier (c’est objectivement le cas de ce projet-là). Vous rendrez possible, en vous rendant dans l’une des centaines de salles diffusant le film dans le pays (en France et aussi en Belgique, en Angleterre, en Espagne, aux États-Unis, en Australie…), un acte philosophiquement original : permettre à un groupe de trouver son public APRÈS l’exécution de ce qui s’avère sans doute être le concert le plus abouti et le plus travaillé de sa carrière…
IRIS : A Space Opera by Justice, jeudi 29 août 2019, 20h30. Réservation par ici.
Visuel © Toni Francois