Vendredi dernier, le saxophoniste Kamasi Washington sortait un nouvel album, « Fearless Movement ». Un disque riche en featuring — mérité, puisqu’il a joué pour les plus grands. Rétrospective.
« Le problème c’est quand on a déterminé que le jazz n’était plus dansant. Et que le courant s’est adapté à ça aussi ». C’est ce qu’expliquait Kamasi Washington en 2018, lors du Nova Club de David Blot.
Le voilà justement de retour avec Fearless Movement, un nouvel album dans lequel il troque son habituelle exploration jazzy en trois heures contre 82 minutes de musique expressive et propice à la danse.
Un album riche en featuring : André 3000 s’invite sur « Dream State », tandis que « Get Lit » réunit le pape du P-funk, George Clinton, et le rappeur D Smoke. Juste retour des choses : Kamasi Washington est apparu sur quelques-uns des disques les plus importants de la dernière décennie. On vous fait un petit tour d’horizon.
« No Thang on Me », Snoop Dogg – Rythm & Gangsta (2004)
Le cool à la californienne. Rythm & Gangsta est l’un des albums piliers du G-Funk, et l’une des premières apparitions de Kamasi Washington sur un disque, en 2004. Snoop Dogg a eu l’œil.
« Cold Dead », Flying Lotus – You’re Dead! (2014)
Le track s’ouvre sur des guitares qui penchent du côté rock de la force. Mais ce n’est que le début du voyage : en seulement 1 minute 45, on passe à travers mille galaxies différentes, sur fond de house stellaire. Le saxophone est votre seul guide.
« u », Kendrick Lamar – To Pimp A Butterfly (2015)
Bam, rien que ça. To Pimp a Butterfly, c’est l’album qui a fait entrer Kendrick Lamar dans la légende. Un disque qui mêle tout l’héritage musical noir-américain — hip-hop, jazz, funk — en abordant frontalement le racisme et la misère. Kamasi Washington faisait partie de l’immense team réunie par Kendrick pour honorer ses racines. On l’entend particulièrement sur « u », véritable disstrack du rappeur adressée à lui-même.
« Them Changes », Thundercat – Drunk (2017)
Un titre culte. La basse de Thundercat sur fond de sample de « Footsteps in the Dark » des Isley Brothers. Kamasi Washington dans tout ça ? Des petites touches de saxophone aérien sur les refrains, juste l’épice qu’il faut pour rendre parfait ce morceau déjà gourmand.
« Deathless », Ibeyi – Ash (2017)
Depuis leurs débuts et la sortie de leur premier album en 2015, les deux sœurs Diaz nourrissent leur musique de la mystique afro-cubaine léguée par leur père, l’immense et regretté percussionniste Miguel Anga Diaz, un héritage précieux cultivé par leur mère avec de nombreux allers-retours à Cuba.
Habité par les esprits de la santeria cubaine, Kamasi Washington fait office de guide vers le monde des esprits.
« Street Fighter Mas », Kamasi Washington – Heaven and Earth (2018)
En plus de faire du saxophone, Kamasi Washington est aussi champion de Street Fighter. Et il compte bien le prouver. Ah, et forcément, c’est Thundercat qui fait la basse.
« Alone », Cory Henry – Best of Me (2021)
Un album inspiré des plus grands, Stevie Wonder, Marvin Gaye, James Brown. Le groove, le smile, tout est là pour s’en donner à cœur joie dans une gigantesque jam très Prince-esque.
« Get Lit » ft. George Clinton, D Smoke, Fearless Movement (2024)
Le rappeur D Smoke et la légende du funk George Clinton : en un titre, l’objectif de « rendre le jazz à nouveau dansant » est accompli.
« Asha the First » ft. Thundercat, Taj Austin, Ras Austin, Fearless Movement (2024)
Forcément, son copain Thundercat est là sur ce nouvel album. Et sur un titre très spécial, puisque « Asha the First » est un titre hommage à sa fille récemment née.
En équilibre entre chansons et instrumentaux, Fearless Movement marque une sortie de la zone de confort pour le compositeur, chef d’orchestre et saxophoniste californien — et c’est une réussite. À écouter en boucle, par exemple dans les bouchons lors du gros weekend de l’Ascension qui arrive.