Flash-back, retour en arrière ! On est à la toute fin des années 80, avec tout ce que cela sous-entend d’enthousiasme chez ceux et celles qui ne les ont pas traversées et de distance pour les autres, ceux qui se sont gavés de clips jour et nuit – surtout la nuit – qui ont vu disparaître le vinyle et naitre le CD, et cru que le rock alternatif (ça marche, ça ne marche pas) serait un jour autre que bipolaire. Les années 80, c’est aussi les années décentralisées où fast-foods et culture pointent le bout de leur nez en région. C’est d’ailleurs durant ces années-là, qu’on ne dit plus province pour parler de ces villes habitées par des sous-préfets des deux sexes, pour décrire ces verts amas de campagne qui tranchent avec le bleu des mers environnantes, ces bouts de forêts et ces sommets enneigés. C’est dire.
C’est au cœur de ce panorama, qu’à Port-de-Bouc nait en 89, Kanjar’Oc, il y a 30 ans, la belle affaire. Vous voyez Marseille ? Vous situez ? A l’Ouest de Marseille, il y a l’Etang de Berre, et plus à l’ouest encore, au far-Ouest, Port-de-Bouc. Ville industrieuse (ne vous y trompez pas, elle n’est guère plus rieuse qu’une ville industrielle), connue principalement pour avoir été la cadre du premier amour de vacances du chanteur François Valéry, au mitan des années 70, Port de Bouc est après Marseille, le principal vivier de talents musicaux en herbe de la région dans les eighties. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder le pédigrée de nombres de musiciens marseillais d’aujourd’hui et de constater qu’à l’instar de l’écurie Ferrari en formule1, PdB (pour les intimes) est au top et que cette ville en lointaine périphérie de la capitale phocéenne fut à la musique marseillaise ce que Berklee College of Music de Boston fut à la scène new-yorkaise et plus largement aux musiques actuelles, un lieu de formation et d’excellence. Mais revenons à nos Port-de-Boucains, aussi appelé pour certains après deux barres d’un pétard petroléogineux et trois doses de jaune bien tassées, Port-de-Boucans, à ces minots cheveux au vent qui se dénommèrent Kanjar’Oc, résumant leur quotidien à la façon d’une compression de César. Leur musique, c’est un peu comme la recette du piton-citron-curaçao de Marius, forcément généreuse : un tiers reggae, un tiers black-rock, un tiers musiques du pourtour méditerranéen sous influence barcelonaise et un tiers bon humeur. Ils ont tout vécu, les tournées régionales puis celles au long court dans l’hexagone ou hors de nos frontières, les premières parties prestigieuses et les grandes scène de festivals aux noms qui claquent. Vus par exemple à Rennes à Bars en Trans en 1994, ils reviendront dans la capitale bretonne 3 an plus tard pour ouvrir à la Cité la 19ème édition des Transmusicales. Chapeau ! Ils ont aussi aligné en indé ou sur des labels sous-main de majors, plusieurs albums Mais, car, il y a toujours un mais; le groupe, d’aventures persos en projets extérieurs, a décidé de faire une pause, puis deux, trois comme à l’apéro, après 15 années bien chargées, mais pas fâché pour autant.
Avec 2019, est arrivé l’heure des 30 ans. Ils remontent sur scène pour le plaisir de partager avec les amis, les fans et leurs enfants; le bonheur être ensemble. Après, on verra bien. Chaps, Buzz, Choukry, Juario, Steph, Lolo, Bibi et Dédou seront là ce soir, à l’ouest il va sans dire, à l’Usine à Istres ! Un rendez-vous qui comme une finale de champions league ne se loupe pas !
La première est assurée par De La Crau. Ce trio emmené par la voix et le mandole de Sam Karpiénia est magnétique. Sam fête lui aussi ces 30 ans de scène, car son premier concert fut avec Kanjar’Oc dont il fut rapidement le guitariste…
Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme ! Et comme souvent avec les bons vins, prend du corps !
Kanjar’Oc + De la Crau à l’Usine (Route de Fos – RN 569 – 13800 Istres.). – 10 €