Bourgeois créateurs et égoïstes ?
Le musée d’Orsay nous propose de réviser le XIXe siècle bourgeois et repu, afin d’y constater l’invention d’un monde moderne, organisé, avec divertissements, théâtres, expositions, grands magasins, acteurs et people.
Après les rois, la Révolution, l’Empire de Napoléon, les guerres et les défaites, la France souffle un peu, et sous ce Second Empire de Napoléon III, va commencer à s’organiser autour des riches, afin de leur apporter le confort et le luxe moderne : mode, décoration, spectacle, publicité, gazettes…
Réalisons que toutes les salles de spectacle à Paris viennent de cette époque : de l’Opéra jusqu’au Bataclan ou Eldorado… Gaîté Lyrique, Châtelet, Vaudeville… C’est la Vie parisienne (mise en opérette par Offenbach), ce sont les mœurs légères (mises en comédie par Labiche). La démocratisation de la fête ?
Un monde nait, viveur, consommateur, égoïste et insouciant, le plaisir faisant marcher les affaires : c’est déjà la société du spectacle ! 1850 : en plein milieu du siècle, l’exposition universelle est lancée, on va à Deauville, on remanie les Tuileries pour la promenade au cœur de Paris, on crée les Buttes Chaumont, un jardin artificiel avec rochers et rivières…
On va à la plage : Deauville, Cabourg…et Arcachon ! L’impératrice fait construire à Biarritz. On copie encore les rois, mais c’est autre chose, une sorte de République impériale ou tous veulent s’amuser, profiter, pas seulement regarder passer les princes.
Les salons de peinture explosent, le public ne cesse d’augmenter. Des milliers de tableaux et de refusés qui font leur salon ! Après Ingres et Delacroix, mythologie et Orientalisme, arrivent les Naturalistes : une femme pique-nique nue avec ses amis dans le déjeuner sur l’herbe de Manet !
1867 : « onze millions de visiteurs pour la deuxième expo universelle ! On se déplace pour voir des marchandises ! » s’étonne un philosophe.
Malgré les guerres et la colonisation, le progrès s’impose : traité d’échange avec l’Angleterre, construction du Canal de Suez (français avec Ferdinand de Lesseps). Liberté de la presse, de réunions, droit de grève…
La ville devient un spectacle vivant, animée par ses habitants, ses fêtes, rituels, dans le décor Haussmanien…
La légende noire du 19eme siècle vient des guerres, des inégalités…misère et prostitution demeurent, malgré les apparences festives. Relisez Zola ! Il faudra chasser l’Empereur pour proclamer le 3eme République à l’Hôtel de ville de Paris.
Mais le bilan est là : cette bourgeoisie commerçante et industrielle a établi la possibilité d’une société organisée, jusque dans ses moindres détails, pour que les fabriques puissent fournir tout ce dont rêve les familles modernes et pouvant acheter.
Le pli est pris, pour le meilleur et pour le pire…
Spectaculaire Second Empire. 1852-1870. 27 septembre 2016-15 janvier 2017. Musée d’Orsay (Avec Bibilothèque Nationale, musée de Compiègne, Carnavalet, + Victoria & Albert Museum).