Nouvo Nova : « Bow » de SAULT.
Chaque jour, Nova met un coup de projecteur sur une nouveauté : le Nouvo Nova vous présente les coups de cœurs de la programmation, afin que vous ne ratiez rien des dernières trouvailles qui nous ont titillé l’oreille. Aujourd’hui : « Bow » de SAULT.
L’année dernière, nous nous emballions pour un projet mystérieux, paru sorti de nulle part. Deux albums jetés dans les Internets comme deux bouteilles à la mer, sans aucune information sur leurs auteurs, si ce n’est un nom : SAULT. On y trouvait un mélange de groove, de néo-soul, de post-punk, le tout avec un son lo-fi, à la fois élégant et crasseux, à la croisée entre Khruangbin, E.S.G et Solange.
Depuis, quelques éclaircissements sur le groupe nous sont parvenus. On sait, par exemple, que la formation est britannique, qu’on y trouve le musicien Inflo, collaborateur régulier de Jungle, et on chuchote que les superbes voix féminines qui l’accompagnent seraient celles de la Londonienne Cleo Sol (aperçue aux côtés de Little Simz) et de la chanteuse de Chicago Kid Sister.
Et voilà que, à peine remis de la claque qu’étaient ces deux premiers disques (respectivement nommés 5 et 7), un nouvel album nous parvient. Et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il colle à l’époque.
Déjà, la pochette : un poing fermé, brandi sur fond noir. Et ce titre : UNTITLED (Black Is). Le message est clair : il s’agit d’un disque révolté sur la condition du peuple noir, dont l’album célèbre l’identité tout en appelant à sa rébellion. En d’autres termes, la bande-son de l’ère #BlackLivesMatter, imbibée du deuil de George Floyd, de Brianna Taylor et de tant d’autres avant eux. Une oeuvre marquée par les violences policières, les inégalités sociales, la dureté du destin noir. Le ton est sombre, politique et défiant, à la fois solidaire envers les communautés touchées et menaçant envers leurs bourreaux. On y entend des discours militants, des choeurs de manifestants, des poèmes commémorant le lourd tribut payé par les minorités dans l’Histoire.
Michael Kiwanuka vient prêter main forte sur le titre « Bow ». Le chanteur londonien d’origine ghanéenne, dont la soul rétro s’est elle-même muée en musique militante ces dernières années, prend le micro sur une afro-funk incendiaire dédiée au peuple africain. Du Kénya à la Lybie en passant par le Soudan, l’Angola ou le Congo, Kiwanuka appelle au respect des libertés de ces peuples opprimés, meurtris par les guerres, le passé colonial et l’intransigeance du pouvoir en place. Avec cette conclusion évidente, scandée comme un refrain : « nous avons des droits ».
C’est là l’un des titres frappants de cet album qui, selon nous, risque fort de marquer 2020. Ailleurs, SAULT blâme : « les excuses ne suffisent pas » (« Sorry Ain’t Enough »), assure que « cette génération en a quelque chose à foutre » (« This Génération »), et enfin, avertit, sur le sublime « Wildfires » : « Je continuerai à m’élever, comme un incendie ». L’été sera brûlant.
Visuel © Facebook de SAULT