Queer ? Queer ! Même sans vouloir trop détourner ou référer au fameux spot Éram d’un Étienne Chatillez entre Jacques Demy et Cruising, permettez-nous d’être très affirmatif : l’ambiance sera 100% queer lors de ce véritable charivari d’automne mis sur (gai) pied, à la Salle des Fêtes du Grand-Parc, par le collectif Bordelle. Mettant fin à une longue absence, leur troisième Bal Queer sera l’occasion pour l’association LGBTQIA+ bordelaise de battre le rappel des troupes, créatures et allié.es en tous genres, avec pour mots d’ordre : flamboyance, tolérance et adelphité, sous pavillons irisés.
Deux joyeuses soirées de shows et de transgression glam, pour « danser contre l’air du temps », auxquelles participeront des platinistes sachant aller plus loin que la petite oeillade à tatie Mylène, des drags (Lolla Wesh, Maison Éclose, Familips) qui défileront sans se défiler, porte-étendards d’une fierceness exubérante, mais aussi des artistes rap, synthpop, tantôt jouant, comme le poète, cette « nuance qui seule fiance le rêve au rêve », tantôt plus rentre-dedans – « de la musique avant toute chose ».
On peut citer notamment la présence de Bagarre, d’Ascendant Vierge, de Franky Gogo. Mais attardons-nous surtout sur les deux figures de proue de cette double affiche, en commençant, chronologie oblige – elle jouera vendredi soir -, par Lala &Ce. Découverte auprès de Jorrdee ou Freeze Corleone, la Lyonnaise (et Londonienne d’adoption) vogue désormais en solo, un premier album à la clé, Everything Tasteful (dont nous vous causions ici-même), ainsi que des apparitions chez Nemir, Vladimir Cauchemar ou, dans un registre plus pop, sur l’excellent « Point Sensible » de Malik Djoudi playlisté sur les ondes de Nova Bordeaux.
Avec ses punchlines incisives et son flow languide, ses instrus flottantes, son homosexualité revendiquée, Lala &Ce est aujourd’hui l’une des noms qui bruissent, qui montent parmi la scène hip-hop ; un « cloud rap » nonchalant, mais sans une mesure laissée à la tergiversation, qui en a conquis plus d’un.e sur notre antenne, que ce soit en studio ou en live – dans la « Chambre Noire » de l’ami Reza, par exemple.
Le lendemain, c’est Julie Budet aka Yelle qui mettra le Grand Parc à sa botte. Électropopeuse acidulée, révélée sur MySpace à une époque où celui-ci n’était pas une vieillerie à placer à côté de Grooveshark, de Caramail et du 3615 Elliott, ça fait un bail que la Briochine ne parle plus à sa main. Un peu Lio, un peu Robyn, Yelle inclut tout le monde et ses voisin.es, au mépris des cloisons et des isolations, sur son dancing queer synthétique où se réverbèrent quatre albums, parmi lesquels L’Ère du Verseau ; un disque paru l’an passé, où elle vous donne, notamment, sa version (non-contractuelle, bien sûr) du dresscode noctambule : “Comment t’habilles-tu ce soir ? Moi je m’habille en noir, je vais sûrement rentrer tard.”
Bien sûr : ne vous arrêtez pas à ces quelques lignes : ça sera encore mieux en vrai. Peu s’y sont trompé d’ailleurs, puisque cette Bordelle #3 affiche d’ores et déjà complet. Mais quelques places pourraient bien circuler sous le manteau : pattes de lapin, fers à cheval, doigts croisés et trèfles très feuillus, à chacun.e sa méthode pour invoquer son sésame de contrebande.