Des affiches #KANYE2024 sont apparues dans les rues américaines.
Après avoir publiquement affiché son soutien à Donald Trump lors de la dernière élection présidentielle américaine, s’être rétracté au moment du Muslim Ban, avoir fait un détour en hôpital psychiatrique, puis affiché de nouveau ses affinités avec l’alt-right, Kanye West est désormais candidat à l’élection de 2024. Il avait déjà évoqué cette idée lors des MTV Music Awards de 2015, en annonçant sa candidature en 2020.
Plus tard, il avait déclaré ne pas vouloir concurrencer Donald Trump (qui pourrait se présenter de nouveau en 2020) et plutôt viser 2024. Le 24 avril, il confirmait cette volonté dans un tweet aussi efficace que concis : « 2024 ».
Campagne d’affichage
Une déclaration que des street-artists américains ont pris au pied de la lettre puisque ce qui ressemble fort à des affiches de campagne sont apparues dans les rues de plusieurs villes américaines. Elles réutilisent une photo promotionnelle qui date de la sortie du sixième album du rappeur, Yeezus (2013), encadrée du slogan « Keep America Great » (dans la lignée du « Make America great again » de Donald Trump), et d’un hashtag, #KANYE20024.
Brooklyn, time to wake up. Victors not victims.#Kanye2024 pic.twitter.com/FF7l50i5J8
— TheFaction (@TheFaction1776) April 23, 2018
Les responsables de cette campagne d’affichage, décrits par le site Hypebeast comme des « street-artists d’extrême droite », ne semble avoir aucun lien direct avec Kanye West. Le rappeur lui-même a tweeté (et supprimé depuis) une photo des affiches accompagnée d’un émoji interloqué.
Sur The Gateway Pundit, un site d’extrême droite pro-Trump, ce collectif d’artistes anonymes déclare : « Nous ne savons pas si Kanye veut être président. Trump a montré que cela générait beaucoup d’ennemis. Mais s’identifier à des vérités culturelles universelles est une chose que les icônes culturelles font mieux que les politiciens, car c’est ainsi qu’elles construisent leur succès ». Ils font également référence à Candace Owens, une journaliste et éditorialiste pro-Trump, que Kanye soutient régulièrement : « Candace Owens se bat pour notre souveraineté et notre indépendance. Le fait qu’elle soit reconnue par Kanye est un véritable tournant pour ce pays. »
Idéologie et pop culture
Certains membres du parti Républicain ont déjà publiquement soutenu une éventuelle candidature du rappeur, sans doute alléchés par sa popularité, notamment auprès des populations afro-américaines (tout comme le parti démocrate se réjouit de la rumeur qui voudrait qu’Oprah Winfrey se présente en 2020).
Le 24 avril, un éditorialiste du Washington Post analysait la manière dont West « à force de vouloir être vu comme un outsider (…) est tombé dans le panneau d’une des pires arguments de vente du Parti républicain », qui voudrait que les « noirs soient des esclaves sur la plantation du Parti Démocrate ». L’argument crée un parallèle entre l’esclavage et les aides publiques, soutenant qu’un État fédéral fort remet les communautés noires américaines en esclavage, c’est-à-dire au service de l’État. Ben Carson, actuel ministre du logement, a d’ailleurs décrit l’Obamacare (la réforme de la sécurité sociale porté par Obama) comme « la pire chose qui soit arrivée à ce pays depuis l’esclavage ».
Un argument issu du Tea Party américain et depuis porté par des personnalités afro-américaines et Républicaines, comme Candace Owens. Celle-ci prend soin d’amener ce débat politique dans la sphère populaire par le biais de la pop culture, en prenant notamment à parti le couple Beyoncé/Jay-Z, pas plus tard que le 6 avril dernier dans un tweet : « Y a-t-il encore des noirs qui ne voient pas que Beyoncé et Jay-Z travaillent à plein temps pour les Démocrates ? Ils sont la preuve vivant qu’être riche n’empêche pas d’être esclave. »
Are there any black people left that can’t see that @Beyonce and Jay-Z work full time for @TheDemocrats?
— Candace Owens (@RealCandaceO) April 6, 2018
They are living proof that no matter how much money you have, you can still be a slave. pic.twitter.com/bZL3Z7HTfM
Selon le Washington Post, lors d’une conférence à l’Université de Californie, elle aurait également expliqué à des représentants du mouvement Black Lives Matter que : « La mentalité victimaire, ce n’est pas cool. Je ne sais pas pourquoi les gens aiment être oppressés. “On est oppressés ! 400 ans d’escvage ! Jim Crow !” Au fait, aucun de vous n’a vécu cette période. Vos grands-parents oui, et c’est embarrassant de vous voir utiliser leur histoire. Vous ne vivez rien d’aussi dur aujourd’hui. » Quelques heures plus tard, Kanye West tweetait : « J’aime la manière dont pense Candace Owens », et apportait ainsi son soutien à cette vieille rengaine Républicaine qui profite aujourd’hui des projecteurs sous lesquels est placé l’artiste. Reste à savoir s’il parviendra à se créer une base électorale, alors que pour le moment, les retours de ses fans sont plutôt négatifs. Peut importe pour Kanye, puisque de toutes façons, « Être grand, c’est être incompris ».
to be great is to be misunderstood
— KANYE WEST (@kanyewest) April 24, 2018