Coloc de Despentes, batteuse punk, romancière, Ann Scott remporte le prix Renaudot de cette année avec le roman « Les insolents ».
Vous l’avez peut-être vu en interview, il y a quelques jours dans la grande Librairie, à la télé, elle remporte le Prix Renaudot pour « Les insolents », publié chez Calmann-Lévy. Ann Scott a un parcours de vie fascinant, la presse anglaise la voit comme une véritable reine française de l’underground.
Son roman, « les insolents » Alex, Margot et Jacques sont inséparables. Pourtant, Alex, compositrice de musique de films, ex-guitariste dingue du Velvet Underground qui connaîtra la toxicomanie, a décidé de quitter Paris. Elle n’en peut plus, veut vivre « aillleurs et seule ». À quarante-cinq ans, installée « au milieu de nulle part », elle va devoir se réinventer. C’est un genre d’alter égo de l’autrice, puisque l’ex-reine des nuits techno queer parisiennes a quitté la Capitale pour la côte bretonne en 2019.
Une aristo-punk
Ann Scott, élevée à Paris par une mère photographe d’origine russe et un père français collectionneur d’art, a vécu une jeunesse tumultueuse. À seize ans, elle s’installe à Londres où elle passe de la musique punk à la batterie, et sera aussi mannequin pour des grands noms de la mode : défilés pour Vivienne Westwood, John Galliano, Yohji Yamamoto, Comme des Garçons, Jean-Paul Gaultier, campagnes de publicité pour L’Oréal… Ann Scott restera mannequin seulement trois ans, mais elle travaillera avec les plus grands photographes, de Nick Knight à Ellen von Unwerth et Paolo Roversi. Elle fut une des premières dans les années 1980 à devenir mannequin alors qu’elle avait plusieurs tatouages. Elle s’atelle à l’écriture de roman à l’approche de la trentaine. En 1995 elle rencontre Virginie Despentes qui vient alors de publier « Baise-moi ». Elles cohabitent. Despentes écrit Les Chiennes savantes, Ann Scott écrit « Asphyxie », son premier succès.
Puis elle écrit « Superstars », avec lequel elle se fit connaitre comme la star littéraire de la scène techno parisienne. Elle a immortalisé l’ambiance des soirées rave des années 90 en France. On lui connaît aussi des amoures avec des actrices et mannequins, notamment la DJ française Sextoy, pour laquelle « Superstars » a été écrit et à laquelle est aussi consacré un portrait dans « Poussières d’anges » (2002). Ann Scott a su décrire avec poésie la génération X de Paris, mêlant clubs queer et musique hard house.
L’isolement et les amitiés parisiennes après les confinements
Maintenant âgée de 58 ans, son succès avec « Les Insolents » imagine d’autres horizons. Ce livre, différent de ses précédents, explore l’isolement et les amitiés parisiennes après les confinements liés au Covid. Elle évite les clichés des Parisien‧nes branchés s’installant à la campagne. Son livre parle plutôt du besoin d’être seul, surtout si l’on souffre de vivre au rythme des autres.
Elle a vécu dans un squat à Brixton, côtoyé la scène des New Romantics. Ses romans dépeignent les cercles restreints des sous-cultures, influencés par son passé de fêtes londoniennes. Une belle découverte pour comprendre l’underground de la génération X.
Secouer le Renaudot
Le choix même de récompenser ce livre serait aussi insolent, pour l’académie du prix. On lit dans l’Express qu’à l’annonce du nom de la gagnante, « Stupéfaction générale : s’agirait-il d’un canular ? Autour de la table des Goncourt, aucun des dix jurés ne connaît ce nom. On se doutait que Françoise Chandernagor ou Tahar Ben Jelloun ne traînaient pas leurs basques au Pulp, la célèbre boîte de nuit lesbienne du boulevard Poissonnière immortalisée par Ann Scott dans Superstars (2000) – on a confirmation que la littérature pop n’est pas leur genre de beauté. » Quoi qu’il en soit, le prix est décerné à ce roman, paru en