Quatre jours de débats, de lives, d’échanges et de transmission à travers l’histoire de la street culture. On était à la L2P Convention, on vous raconte.
Bientôt un demi-siècle que le hip-hop irrigue nos sociétés et nos oreilles à coups de punchlines acérées, de breakdance, de battles ou de graf. Un mouvement avant-hier underground, hier alternatif, aujourd’hui mainstream, qui tend à s’institutionnaliser en France ces dernières années. Entre l’exposition Hip-Hop 360 à la Philharmonie de Paris, le film Suprêmes d’Audrey Estrougo ou la série Le Monde de Demain (diffusée sur Arte et qui raconte l’histoire de Dee Nasty, du Suprême NTM et donc en partie de Radio Nova), la culture du hip-hop dans notre société fait désormais partie intégrante du paysage (mémoriel et muséal).
De la rue au musée
Depuis trois ans, la culture hip-hop a même une convention qui lui est entièrement dédiée, la L2P, organisée par le centre culturel La Place, dans le quartier des Halles – bastion endémique du mouvement à Paris. Un temps d’échange, de réflexion et de transmission à l’initiative de Julien Cholewa, directeur de La Place et programmateur de cette convention organisée cette année dans différents lieux (La Place, le Musée d’Orsay, le FGO Barbara).
Les étapes marquantes de cette édition 2023, où se sont présentés quelque 150 professionnels, artistes, experts, chercheurs ou journalistes (Yasmina Benbekaï, Ngiraan Fall ou encore Ismaël Mereghetti) ? Des ateliers sur le lyricisme et sur les outils de création de projets artistiques, une conférence sur les contrats et les métiers dans le rap en 2023, une découverte des nouvelles pratiques des structures culturelles face au réchauffement climatique, l’intervention d’avocats spécialisés dans la liberté d’expression, ou même la très attendue présentation – entre Van Gogh, Monet et Manet – de l’équipe de France de Breakdance au Musée d’Orsay ! Un bon avant-goût des battles qui nous attendent aux JO de Paris 2024…
Pour la première fois, la L2P Convention accueillait également un espace de rencontres. On pouvait notamment y retrouver des médias spécialisés (Mosaïque, 33 Carats, Breakers Magazine), des professionnels du milieu du hip-hop (la photographe Roxane Peyronnenc, l’attachée de presse Cécile Plancke) et des organismes comme la SACEM et le Centre National de la Musique.
Cette édition 2023 de la L2P Convention a aussi été l’occasion de réaffirmer le rôle capital des femmes dans la culture hip-hop. Un rôle fondateur et émancipateur dont ont témoigné toutes les intervenantes d’une programmation largement paritaire. Des intervenantes (DJ Pom, DJ pionnière depuis les années 90 ou Karima de la compagnie Aktuel force), qui ont rappelé à quel point se faire une place dans un milieu majoritairement masculin, souvent machiste, n’a pas été simple.
Faire en sorte que le public identifie le nom des actrices autant que celui des acteurs ? Pas évident. Permettre qu’il se rappelle les noms de Melgroove ou d’ADM derrière les tubes des années 90 “Apoca arrive” ou “When You Wanna Move” ? Un chemin de croix.
“L’histoire du hip-hop a beaucoup été écrite par les hommes. Il fallait se battre pour ne pas oublier qu’elle a aussi été écrite par les femmes”, rappelait par exemple Pascale Obolo, co-fondatrice du groupe Ladie’s Night, lors d’un talk animé par Yasmina Benbekaï.
« Pour être acceptée, il fallait être passionnée. »
Fancie, graffeuse et productrice
La L2P s’est voulu aussi cette année un espace de parole libre pour les personnes issues de la communauté LGBTQIA+. On est allé à la rencontre de Laura Maillard, Mélissa Verdoux, Bboy Virus et Amandine Scurra, danseurs pluridisciplinaires, qui nous ont présenté Highlights, un collectif de danse questionnant les thématiques LGBTQIA+ à travers la danse hip-hop. Une nouvelle manifestation, s’il en est, de la pluralité désormais bien affirmée d’un mouvement qui n’a pas fini, et en cela le passé peut être une indication sur le futur, de se renouveler.