Forcément, aujourd’hui, quand on a moins de 40 ans et que l’on est marseillais, le nom de La Luna n’évoque pas grand-chose. Pour quelques quadras et plus, c’est le nom du lieu qui abrita de leurs premiers émois électro et pour ceux dont les oreilles avaient déjà été dépucelées ailleurs, le lieu où leurs émois ont pu s’inscrire dans le temps, devenir « durables », pour reprendre un vocable guère compatible avec les drogues de synthèse en vogue dans ces lieux où la vie démarrait le plus souvent au milieu de la nuit et se finit aujourd’hui encore en plein du jour, sous le soleil de midi.
C’est là, dans ce club alors baptisé Le Rock’n’Roll, au 5 rue Molière, que l’équipe d’Atomik posa sans trop savoir comment cela allait fonctionner, l’after de sa deuxième rave à la Friche de la Belle de Mai. Au début de la dernière décennie du siècle passé, l’électro n’avait guère le droit de cité dans la cité de Phocée. Bien sûr, le Tunnel accueillait déjà, dans sa salle au fond à droite, quelques DJs pour des sets house/acid-house chronométrés. Rien de plus. La prise de risque commençait et s’arrêtait là. Il ne fallait pas déboussoler le danseur qui à l’époque raffolait plus des décolletées vertigineux de Madonna ou des fameux coups de reins de Mister Dyyyyyyynamiiiiite que des beats mécaniques des premières machines à rythmes.
C’est cette after réussie qui a donné aux deux tauliers de l’époque (Xavier et Théo, aka les frères Mas, la cinquantaine à deux) et à Nenette, une Dame à l’âge certain et patronne du lieu, l’envie de transformer le Rock’n’Roll en club 100% électro. La Luna était née ! Jack et Paul en seront les résidents. « Quand j’avais 15 ans » se souvient le premier, « je venais danser ici. Ça s’appelait L’Oreille en Coin, c’était avant le Rock’nRoll et Xavier en était le DJ » ajoute Jack. « Quand on a ouvert, nous n’étions pas sûr que le public friand de raves converge vers un club. A tel point que pour le premier soir, on avait n’avait pas oublier d’inviter un DJ à même de rassurer les fêtards que notre virage aurait pu dérouter. Mais, ça a fonctionné. On a vite pris le rythme. Vendredi techno, samedi house et dimanche carte blanche. Une fois par mois, on s’autorisait même une pointure nationale ou internationale. En octobre, notre premier invité fut Laurent Garnier. En novembre, vint Kenny Larkin, puis Roberto, la star des afters gay londoniens et d’autres encore (Tom Parris, Nick Nose…). ».
La Luna a duré le temps d’une révolution, celle des musiques électroniques à Marseille, le temps d’enfoncer des portes qui ne se sont jamais refermées depuis. « Il y avait quelque chose de très frais, d’éminemment libre, ça touchait toutes les classes sociales, toutes les tranches d’âge. L’esprit était très Peace & Love, hédoniste. On venait pour faire la fête, bouger son corps ! » s’enthousiasme aujourd’hui celui qui apparaissait sur les flyers sous couvert de Happy.
Ressuscitée le temps d’un week-end anniversaire – 25 ans après – La Luna retrouve ses étoiles sous le ciel marseillais : Jack et Paul, Paul & Jack qui un temps avait ouvert ensemble une échoppe à vinyles avant même de songer à créer leur label et tout ça avant la 3G ! À peine croyable, ainsi va la vie marseillaise !
Le 26 janvier avec Jack de Marseille et Paul Virgo aux platines au One Again Club (23, rue Saint-Saëns – 13001 Marseille).
Before officiel by les Vagabonds Marseillais au Marlin (7, place aux Huiles – 13001 Marseille).