La chronique de Jean Rouzaud.
Dans la tourmente des nouveaux groupes, en plein carrefour des genres : Folk, Rock, R&B, Pop, Jazz, Soul, Dance, Latin, Free… et surtout avec l’établissement d’un business musical mondial, les Brésiliens ne pouvaient rester inactifs dans cette marmite.
Déjà, dans les sixties, la Samba, puis la Bossa Nova avaient commencé à faire un malheur dans les cercles d’amateurs avant-gardistes de « World music », et surtout les jazzmen avaient entamé leurs collaborations avec les Caraïbes, Cuba et bien sûr le Brésil.
Le « Tropicalisme » avait commencé à frapper.
Miles Davis avait invité Airto Moreira, le groupe fusion Weather Report était rejoint par Dom Um Romao (transfuge de Sergio Mendes) et Flora Purim était devenu avec Airto, membre du groupe de Chick Corea, Milton Nascimento collaborait avec Wayne Shorter, etc.
Le rêve (nord) américain ?
La dictature militaire avait aussi fait fuir pas mal d’artistes, à mesure des répressions, mais surtout l’Amérique du Nord tendait les bras à tous ces virtuoses (la liste est interminable), si utiles au sein de groupes qui devaient produire et tourner dans le monde…
Soul Jazz Records, dans son interminable quête de moments musicaux historiques, et d’exhumation de catalogues ou de bandes prestigieuses, propose seize morceaux du florilèges de cette fusion entre USA et Brésil à ce moment charnière des années 70.
En France, nous avions les yeux tournés vers la fin de l’Underground, du Psychédélisme (abordé au Brésil par Os Mutantes), les hoquets de la Pop ou du Rock Progressif, des vagues de Rythm and blues…
Mais la force du rythme brésilien, et les finesses des mélodies genre Bossa, commençaient à gagner du terrain après les tubes 60 de Samba à Rio (Carnaval) et de Bossa à Ipanema (Astrud Gilberto), succès d’été, avant coureurs de la lame de fond à venir…
En fait, un lien se dessinait entre US et Brésil, et les connotations latinos et brésiliennes ne cessaient de s’interpénétrer (cela durait depuis les années 40, Carmen Miranda (la première « bomba latina », le dessin animé « Saludos amigos », Carlos Santana, comme repères connus).
Avec les stars Antonio Carlos Jobim, Joao Gilberto, Sergio Mendes, Milton Nascimento pour ne citer qu’eux, Charlie Byrd, Stan Getz, Lalo Shiffrin… Autres grands, la collaboration devenait évidente, tant pour les grands orchestres, que pour les B.O. de films ou les apports rythmiques et mélodiques propres à faire danser sur des tubes.
La Bossa allait devenir une alliée précieuse de toutes les musiques Lounge, Chill et Easy Listening de Burt Bacharach à Cal Tjader…
Ce CD 16 titres donne un panorama de cet enthousiasme, feu d’artifice de genres, mélanges de Jazz, Samba, et de toutes sortes de chants, pianos, guitares, flûtes et percussions.
On voyage de Samba Jazz, détours Bossa Nova suaves, orchestrations genre B.O. de films, breaks africanistes, chants populaires, Batucadas, virtuosités modernes brésiliennes, tambours et cris mêlés au piano bar.
Plongée dans une « fusion » d’aller et retour US-Brésil rare et forte.
Brazil USA 70. Brazilian Music in the USA en the 1970’s. Soul Jazz Records. CD 16 Titres avec booklet historique illustré de 45 pages partant des années 60 + Bios des musiciens à la fin (Flora Purim, Sivuca, Dom Um Romao, Luiz Bonfa, Eumir Deodato, Joao Donato, Moacir Santos, Luiz Eca, Milton Nascimento…Aito Moreira). Existe en double LP Vinyl (avec les mêmes bonus livret photos etc.)
Visuel © Getty Images / John Springer Collection