En 1997, Jessica Persée est en pleine adolescence. Elle sort le tube « Li Sem », qui cartonne à La Réunion. En 2019, le morceau est en playlist sur Nova.
En 1997, Jessica Persée n’est âgée que de quinze ans mais possède déjà, c’est rare, une carrière largement remplie.
Fille du chanteur réunionnais Patrick Persée, elle a enregistré son premier morceau (« Faux Train ») alors qu’elle n’était âgée que de dix ans, a tourné avec le projet live de son père (le Persée Poliss, qui mélange reggae, rock. maloya, séga) à La Réunion et en métropole (premier Zénith à onze ans, de quoi être impressionnée…), a sorti son premier album solo Di pa papa, aux côtés de Momo Manancourt, Dominique Candy, Maxime Rosalba. Enfant star, elle mène de front la vie d’artiste et la vie de lycéenne, contraires mais dans son cas, complémentaires. À quinze ans, pour elle, tout va bien.
Tubesque à La Réunion, inconnu en France
En 1997, en France, on écoute Doc Gynéco chanter qu’il est né ici, et non pas là-bas. À La Réunion, dans l’un des autres départements d’outre-mer (Doc Gynéco, lui, est originaire de Guadeloupe), on écoute Jessica Persée, et « Li Sem », sa chanson doucement révoltée qui dit, en créole : « La tèr la offre nout toute un ti karé, il fau nou respect la société ».
À Saint-Denis, à Saint-Gilles les Bains, et Saint-Pierre, le morceau formule l’espoir et les idées de lendemains plus beaux, porté par cette production reggae ronde et mélodique, devient un tube. À la radio, dans les boîtes de nuit, on le joue beaucoup. À sa sortie, plus de 3 000 exemplaires sont vendus sur l’île ! Mais si là-bas, le titre atterrit sur pas mal de compilations, il ne dépasse toutefois jamais vraiment les limites de l’île de La Réunion. En 1997, et les mois qui suivirent, loin de l’océan indien, vous ne l’avez sans doute jamais entendu. En 2001, la compilation Reggae Massive 5, en 2001, accueille le morceau à côté de Tonton David ou de Kaya, mais pour ce qui est de la métropole, c’est à peu près tout.
La tèr la offre nout toute un ti karé, il fau nou respect la société
Vingt ans après ce tube, et alors que Jessica s’est tenue éloignée de la musique pendant un moment (elle n’était revenue qu’en 2014 pour sortir un album, Viv’, loin de ce qu’elle faisait étant jeune adolescente), les fouineurs de La Souterraine ressortent ce titre au charme fou. Le genre à être parcouru par ces longs solos de guitares électriques que l’on n’a plus tellement l’habitude d’entendre en 2019. « J’ai envoyé plusieurs messages à Jessica via différents canaux restés sans réponse, donc bon couraz comme on dit là-bas ! », nous dit Benjamin Caschera, qui a cherché un fantôme sans jamais le trouver, et qui a calé « Li Sem » sur Rurbain, la nouvelle compilation de La Souterraine (qui a permis, jadis, à des artistes comme Malik Djoudi, Les Vilars, Baron Rétif & Conceptión Perez, Mohamed Lamouri de sortir de l’ombre), et qui accueille cette fois, outre cette merveille de maloya frais et révolté, une version revisitée de l’« Au DD » de PNL signé Cerf d’Assaut, la techpop homicidaire et noctambule de Daisy Mortem (« L’accident est inévitable »), la pop guindée et eurodancée d’un lyonnais qui chante Marseille et les filles respectables (Paolo Franco, « Marseille vrai ») ou encore la pop toujours aussi pacifiste de Barbagallo (proche de Tame Impala, avec lequel il jouait).
« Li Sem » de Jessica Persée : le morceau est parvenu à nos oreilles grâce aux efforts de La Souterraine, et est parvenu aux vôtres depuis, puisqu’il est, désormais, en playlist sur Radio Nova. « On a contacté avec insistance Jessica et son entourage sans succès, donc si vous entourez Jessica, écrivez-nous ! » Si quelqu’un entend ce cri, qu’il n’hésite pas.
Visuel © La Souterraine