L’ouragan médiatique a transformé la dénonciation de l’inceste en plaidoyer pour la pédocriminalité
Ou comment Lolita a été transformée en sex-symbol par un tourbillon médiatique, alors que son auteur l’a construite comme la victime d’un inceste. Le très célèbre roman, paru aux États-Unis en 1958 et adapté au cinéma par Stanley Kubrick en 1962, raconte la relation entre un homme de 37 ans et sa belle-fille 12 ans.
La critique présente bientôt « Lolita » comme un plaidoyer pédocriminel scandaleux, et le personnage éponyme comme une enfant provocatrice, une « allumeuse ». C’est notamment Hollywood, habitué à sexualiser les enfants, qui en fera une « nymphette » insolente et sulfureuse. « J’aimerais pourtant que quelqu’un remarque la tendre description de l’impuissance de cette enfant, sa pathétique dépendance envers le monstrueux Humbert Humbert, et son courage déchirant tout du long » écrit Véra Nabokov dans son journal, « L’ouragan Lolita », publié mercredi 4 octobre en France. Véra Nabokov (comme beaucoup effacée derrière le doux titre de « femme de ») était non seulement l’épouse de Vladimir Nabokov, mais aussi sa dactylographe, son éditrice, sa chauffeuse (puisque son mari n’avait jamais appris à conduire) et parfois sa traductrice. La légende dit qu’elle aurait plusieurs fois sauvé du feu les brouillons de Lolita, que son mari voulait détruire, plus certain de vouloir finir et publier un roman trop provocant.
Son journal dormait dans les archives de Nabokov stockées à la New York Public Library. Ce sont les Éditions de l’Herne qui se sont intéressées à ces précieux écrits. Mélanie Bauer ressort cette interview de l’écrivain, extraite des archives de l’INA.