Puisque son piètre remake confond terrain de jeu social et jardin d’enfants, autant retourner dans la cour des grands en revoyant, l’original, une des meilleures comédies françaises des années 70.
Par les temps qui courent, le cinéma français est en grosse demande de valeurs sûres pour éventuellement faire revenir le public dans ses salles. Alors forcément, le principe d’une comédie, genre éminemment populaire, qui plus est avec Jamel Debbouze, star tout aussi populaire, a quelque chose de rassurant pour l’industrie. Plus encore si cette comédie repose sur un modèle qui a fait ses preuves, à savoir Le Jouet, l’un des meilleurs fleurons de la production des années 70. A l’époque, Francis Veber, déjà scénariste émérite, passait à la mise en scène avec cette histoire d’un chômeur longue durée, joué par Pierre Richard, qui se retrouvait employé par un journal appartenant à un gros groupe industriel, avant que le fils de son PDG ne décide sur un caprice de le réclamer comme jouet pour son anniversaire. Quasiment cinquante ans plus tard, l’idée d’un remake, au vu de la situation sociale comme du rapport de classes entre super-riches et classe ouvrière n’est pas une mauvaise idée en soi. Encore fallait-il que cette nouvelle version soit à la hauteur de l’originale
Et alors, à l’arrivée ce Nouveau Jouet sait-il changer les piles de l’ancien ?
Manque de bol pour le film de James Huth, celui de Francis Veber ressort en même temps. Et autant dire que la comparaison ne joue pas en faveur du remake. Au minimum quand le discours du film de 1976 résonne d’emblée avec le monde d’aujourd’hui mais paraît encore plus incisif, virulent, là où sa relecture l’a totalement lyophilisé, rétrécissant des sujets clés telles que l’intégration ou le fossé interclasses sociales en une vision bisounours du monde, façon l’argent ne fait pas le bonheur, pour asséner que la misère rend solidaire, heureux malgré tout, mais que l’ultra-richesse enferme dans une forteresse de solitude. Ça a le mérite d’être tellement hors sol face à l’époque actuelle, que ça en fait oublier l’absence totale de direction d’acteurs ou une mise en scène antidatée de cartoon ressuscitant les pubs fluo des années 90, plus agitées qu’agitatrices. Le plus troublant dans la superposition des deux films restant de s’apercevoir à quel point Pierre Richard affirmait bien plus à l’écran, un côté engagé, militant, qu’un Debbouze, pourtant à l’origine économique d’un remake qui, à l’image de son affiche, remet sous blister toutes velléités de revendications, reconditionnées en quelques faméliques allusions, au profit d’une amorphe et lénifiante comédie sur les bienfaits des valeurs familiales et de la paternité. Evidemment, le film de Veber ressort dans une combinaison de salles bien moindre que Le nouveau jouet. Toutefois, pour voir le film le moins périmé des deux, on ne saurait que conseiller de chercher celles qui reprennent un Jouet encore sous garantie d’un nécéssaire poil à gratter là où sa revisite, incroyablement feignante, en a un énorme dans la main.
En salles le 19 octobre