L’Éthiopie, l’Israël, et le Café Nova.
Pour bien comprendre la musique, le message, de Gili Yalo, il faut remonter dans le temps, une trentaine d’années en arrière. Nous sommes en plein hiver 1984, l’Éthiopie essuie l’une des plus grandes famines de l’histoire après des années de guerre civile : 1 million de morts et des centaines de milliers d’Éthiopiens qui fuient pour se réfugier dans les pays voisins.
Cet exode, Gili Yalo l’a vécu, chantant sur les épaules de son papa, traversant le désert à pieds nu pour rejoindre les camps de réfugiés soudanais. Survivre d’abord dans ces camps avant d’être sauvé par la légendaire Opération Moïse organisée par l’armée israélienne pour sauver les Juifs éthiopiens et leur offrir une nouvelle vie en Israël. C’est ainsi que Gili Yalo débarque à l’âge de 5 ans du coté de Sfat. Toute une jeunesse à essayer de s’intégrer au mieux, d’adopter totalement et fièrement sa nouvelle vie, son nouveau pays, une nouvelle langue, en mettant de coté son passé érythréen, mais par contre sans jamais s’arrêter de chanter.
Et puis, le déclic, un coup du hasard, mais surtout une prise de conscience, une révolte face à un pays qui, comme trop d’autres aujourd’hui, n’intègre pas comme il le mérite ses populations d’immigrants, travailleuses et discrètes, peut-être un peu trop discrètes… Alors Gili Yalo a replongé dans ses racines, réapprit l’amharique, sa langue originelle, et grâce aux veilles cassettes de sa maman redécouvertes, cette si puissante éthiopique musique, Gili Yalo vient aujourd’hui réveiller les esprits, en portant fièrement la voix de ceux que l’on nomme maladroitement « les Falashas », avec une musique qui a pour ambition de réunir l’orient, l’Afrique et l’occident soit un savant mélange très moderne d’éthio psyché jazz baignant dans le funk et la soul musique.
Son premier album vient tout juste de sortir sur le label Dead Se Records.
Images : Nicolas Lartigue
Son : Emmanuel Baux