La disparition de l’opprobre sur les gens sales et paresseux, c’est pour demain ?
Notre journaliste Marie Misset l’affirme, dans la matinale, depuis le début de l’été : Tout doit disparaître. La preuve.
Étant moi-même un peu crado, je vous en parle en connaissance de cause.
Avant, ne pas tirer sa chasse d’eau : un peu crado. Pisser dans sa douche : gros scandale. Remanger dans une assiette sale : ah ouais quand même…Ne pas s’épiler parce que franchement la flemme : on te regardait mal…Se laver les cheveux une fois par semaine et se doucher un jour sur deux : clairement, tu ne prends pas soin de toi. Ne pas se maquiller, parce que pareil, la flemme : tu pourrais quand même faire un effort pour les pauvres gens qui doivent te regarder toute la journée…
Et il y a encore vraiment pas très longtemps, parler de sa cup menstruelles pour les filles entraînait invariablement un regard, d’abord de terreur, puis un « je préfère pas en parler ». Et dans le meilleur des cas « lâche-nous avec tes trucs de babos ».
Mais l’urgence de préserver un peu la planète et notre santé est passé par là, et tous mes gestes de crado sont devenus des gestes militants. Ne pas tirer sa chasse, pisser dans la douche, remanger dans une assiette sale : ça c’est écolo, ça c’est militant…on ne gâche pas de l’eau pour nos sales petites habitudes d’occidentaux hypers consommateurs.
Je ne suis plus un peu négligée : je suis à la pointe du combat !
Ne pas s’épiler, ne pas se maquiller, ne pas se laver les cheveux, ne pas mettre de déo avec plein d’aluminium dedans : ça, c’est prendre soin de soi, ça c’est ne pas se laisser faire par le patriarcat, c’est imposer sa condition féminine au monde. Et en plus, ça évite de se mettre plein de produits chimiques sur la tête et dans les cheveux, des produits qui, a plus ou moins long terme, me pourriront la santé.
Gloire à la flemme
La flemme est devenue militante, c’est un cadeau pour beaucoup de gens qui avouent aujourd’hui fièrement des pratiques qu’ils cachaient hier.
La flemme, parlons-en. Hier et encore, aujourd’hui, dans de nombreux endroits, la flemme était synonyme de vies gâchées. un potentiel en berne. La flemme, c’était vraiment dommage. Mais dans un monde en surchauffe, la flemme est la prochaine grande tendance : « Il faut avoir la flemme », disait même il y a six mois dans Le Parisien le neuropsychiatre Jean-Didier Vincent. « C’est une forme d’adaptation qui permet d’éviter le surmenage. » Le même article du Parisien citait Andrew Smart, un neurobiologiste américain, qui estime que de la paresse naît la créativité et l’inspiration.
Et le signe ultime, c’est que même la mode s’y met. Les carnets de tendances de l’année 2018 n’avaient que deux mots à la bouche : « Be Lazy » – soyez paresseux -. Ce qui donne en langage mode des hommes qui s’habillent en sac de couchage et des femmes en tailleur pyjama.
La révolution est proche : très bientôt les gens crados, négligés et un peu flemmards seront à la pointe du bon goût. D’ailleurs, on ne les appellera plus comme ça. Ce seront des gens no make up, hyper écolo-friendly et super-créatif.
Visuel : (c) The Big Lebowski