Figurez-vous qu’il y a du génie là-dedans.
L’une (Julia Lanoë, aka Rebeka Warrior), ancienne diplômée des Beaux-Arts à Nantes, semble réapparaître, toujours, sous une identité nouvelle, via les projets qu’elle accumule depuis une quinzaine années. Des projets parfois burlesques et agressifs (Sexy Sushi, mené avec David Grellier, le créateur du collectif Valerie qui officie aussi sous le nom de College), poétiques et dépressifs (Mansfield.TYA, mené avec la violoniste Carla Pallone), chaotiques et éclairés (ses mixes allumés intitulés Follow the Leader), mais dans tous les cas, toujours complètement punks.
L’autre, Pascal Arbez-Nicolas, a sorti en 2017 son quatrième album (Voyager) sous le nom de Vitalic, et s’impose depuis quasiment vingt ans comme l’un des grands représentants de la musique électronique à la française, techno, raveuse, et mélodique.
Einstürzende Neubauten, mais en mode dansant
Déjà vu ensemble en 2012 sur le dévastateur morceau « La Mort sur le Dancefloor », qui figurait alors sur l’album Rave Age de Vitalic, les deux individus voient aujourd’hui plus loin, et forment le projet Kompromat. « Inspiré par les débuts de la techno berlinoise, il se situe entre Einstürzende Neubauten et Crash Course in Science. Punk, rock, sombre et profond, COMPROMET appelle à la fois au cri de guerre et à la prière. Pour bouger les bras en l’air, mais danser tout en pleurant », lit-on dans un communiqué de presse laconique. Rien que ça.
Je veux ce qu’il y a de plus rapide, de plus sale. J’ai trop perdu mon temps, vous savez. Beaucoup trop
Un album arrivera au printemps, mais avant ça, il y a ce clip en forme de court-métrage, qui illustre le morceau « Niemand ». Réalisé par Bertrand Mandico, le cinéaste auteur, en 2017, du très remarqué (et très brut) Les Garçons sauvages, celui-ci s’impose, d’ores et déjà et puisque l’exercice fait désormais plus figure d’outil promotionnel que de véritable démarche artistique, comme l’un des clips les plus frappants de l’année. Dans la vidéo, une jeune fille au regard lointain et à la démarche épuisée rend visite à un duo, qui lui promet l’extase. « Je veux ce qu’il y a de plus rapide, de plus sale. J’ai trop perdu mon temps, vous savez. Beaucoup trop », implore-t-elle. Au volant d’une bagnole (qui représente ce qu’il fallait obtenir, ou le chemin qui mène à ce qu’il va falloir obtenir – allez savoir), la jeune femme se lance alors à grande vitesse, mais se fait percuter en chemin par un obstacle qui changera beaucoup de choses… L’accident de voiture fut mortel, mais permet paradoxalement à la jeune femme de se relever…
Niveau ambiance (lugubre, noire, mystique, décharnée), on songe à Fernando Arrabal, et tout particulièrement au confidentiel et très conceptuel Cimetière des Voitures, qui mettait en scène un Alain Bashung christique et adulé dans un monde post-apocalyptique. Niveau scénario (les spectres d’un autre monde, les humanoïdes, le monde qui ne va pas très bien…), c’est plutôt à Philip K. Dick que l’on songe, et à ces histoires qui invitent toujours la poésie et l’espoir dans des mondes, proches et lointains, où il en manque souvent beaucoup.
Rebeka Warior, Vitalic : c’était hier soir en exclu dans le Nova Club de David Blot, et c’est aujourd’hui en images sur nova.fr
Visuel (c) clip de « Niemand » de Kompromat