Une maladie transforme peu à peu les humains en animaux…
Enfin! Cela faisait tellement longtemps qu’on attendait que l’imaginaire du cinéma français se renouvelle, qu’on avait fini par abandonner la possibilité d’en finir avec un certain formatage. Et puis voilà que débarque un film qui se contrefout des barrières culturelles comme des frontières narratives. Le règne animal s’attaque donc aux codes de notre écosystème d’images et d’histoires, au minimum en lui proposant une nouvelle jungle de récits. Difficile de faire entrer le second film de Thomas Cailley – après le déjà remarqué Les combattants– dans une case, justement parce qu’il les réfute. À partir d’un scénario reposant sur des mutations, celles causées par une maladie qui transforme peu à peu les humains en animaux, Cailley tente des greffes inédites. Le règne animal tient à la fois et entre autres du film fantastique et de l’étude de mœurs, d’une fable écologico-sociologique et d’une chronique d’adolescence. Tout ici est observation de corps qui se transforment, de ceux des personnages à celui d’un récit qui s’ouvre aux possibles. Mais surtout qui affirment qu’il est nécessaire de devoir s’adapter aux fluctuations du monde si l’on veut survivre aux crises qui exigent une réinvention des modèles.
Le règne animal tient donc d’un acte de renaissance, de transition vers des métamorphoses sociales, culturelles mais avant tout organiques, jusque dans la chair même de notre cinéma. Cette mue se pressentait déjà, au vu de films singuliers comme ceux des frères Boukherma, Julia Ducourneau ou Thomas Salvador, tous tentant des expérimentations, des hybridations, mais Le règne animal annonce que ce mouvement est enfin à maturation, que l’ADN du cinéma populaire peut enfin être combiné avec des ambitions formelles comme d’écriture ou de propos. Le règne animal est traversé de créatures, cousines ou descendantes de celles qu’on a pu croiser chez un Guillermo Del Toro ou un Miyazaki, qui ne demandent qu’à vivre en liberté, mais pas autant qu’un film français d’une espèce nouvelle, dont il est plus que souhaitable qu’elle fasse beaucoup de petits afin que cette ode à la différence devienne une bienvenue norme.
En salles le 4 octobre