Un livre retrace l’histoire du rockabilly, ces « ploucs sous amphétamines »…
Le grand mérite de cette Glorieuse histoire du Rockabilly de Max Décharné est son classement, intelligent et drôle, et sa capacité à réintégrer les vieilles paires de santiags dans une garde-robe possible.
Car si Max Décharné est un fin historien, c’est aussi un artiste, un songwriter (avec son groupe « the flaming stars »), et un vrai auteur ayant une attitude construite vis-à-vis des musiciens, de leurs trucs, de leurs faiblesses et génie, et de leur place réelle.
ces « péquenauds sous amphétamines »
On a donc droit aux débuts fracassants, avec ces « péquenauds sous amphétamines » qui sont la préhistoire du Rock, ce « Hillbilly » éructé par des garçons de ferme, mais agités et délurés au point d’inventer, sans s’en rendre compte, un nouveau style … qui durera des décennies.
Il nous raconte les liens de sang du Rock avec la country et avec un zeste de Blues, les étapes de trouvailles, de dérapages et de consanguinité avec le business, les dollars sacrés et maudits, les dizaines de labels champignons qui sortent de partout, mais aussi les noyaux noirs des Honky Tonk, les filles, les tarés, les magouilles et surtout les revivals !
Car, après le feu d’artifice américain, la moitié de cet historique se situe en Angleterre, avec les Rockers des sixties qui vont s’en prendre aux Mod’s dans des batailles rangées mémorables, puis, début seventies, avec les Teddy boys en veste longue ; Edwardian et Creepers contre Punks.
Et enfin vient le tour de toutes sortes de dandies rétros qui seront Rockab en pleine New Wave comme les Stray Cats ou Willy Deville, puis Psychobilly pendant le Grunge, comme les Cramps, et qui restent méchamment Rock jusqu’à aujourd’hui … c’est le cas du label français Born Bad, par exemple.
L’autre mérite de ce récit, c’est de nous passer en revue un paquet de Rockers dingos des fifties qui ne sont jamais arrivés jusqu’à nous ! Et que des fans ont ressorti 35 ans après, genre Hasil Adkins.
l’enfer paradisiaque du Rock and Roll originel
Nous n’avons vu que la partie immergée de l’iceberg qui a coulé l’establishment, il y a quasiment 60 ans : le « Be Bop », avec des pointures comme Ike Turner, un des tout premiers rockers ! En bref la France n’a aperçu à l’époque que 10 % de la pièce montée – qui était un genre de fusée à étages – et il a fallu des re-pressages, des festivals, des modes, et des lassitudes pour retourner chercher ces anges de l’enfer paradisiaque du Rock and Roll originel.
L’ami Max nous a concocté des chapitres regroupés instructifs : sur les filles, ces héroïnes Rock indispensables, sur les thèmes de chansons scabreux – sexe, alcool, drogues, mineures, animaux et fétichismes divers, et il nous raconte les labels aux noms impossibles : Bobcat, Pompadour, Speed, Bluebonnet … Quant à l’index de noms propres, il constitue une réserve de noms pour un roman baroque, un genre de polar international : Arnold Kokomo, Billy Barrix, Choctaw Ramblers, Arthur Crudup, Sleepy Labeef…
Bref l’exotisme flamboyant des US fifties à son paroxysme, avec ses coiffures hautes : le dessus gonflé en Pompadour et le reste ramené en arrière, en cul-de-canard, pour les garçons et le chignon vertical, ce bombardier « B 52 » pour les filles…
un voyage pré-psychédélique
Le livre entier est un voyage pré-psychédélique, déjà arrosé de gnôle et de cachets multicolores.
C’est pourquoi, à la surprise générale, NOVA vous parle de cette géniale anthologie.
Another World from outer space ?
A lire : Wild Wild Party – La glorieuse histoire du Rockabilly d’Elvis aux Cramps, par Max Décharné.
Editions Rivage Rouge, 330 pages. 21 euros.