Le label Bongo Joe réédite la musique des années 60-80 des deux petites îles de São Tomé et Principe. En avant-première sur Nova.
Défricher ce qui est broussailleux, reparler de ce dont on ne parle plus, permettre d’entendre ceux qui ne peuvent plus s’exprimer, exhumer des raretés, rééditer des disques et des artistes que l’on ne trouve plus nulle part. De ces démarches d’archivages, de pure philanthropie, de réédition, on vous parle très régulièrement sur Nova. Nombre de labels se sont spécialisés, et depuis un moment, dans l’affaire — Awesome Tapes From Africa, Analog Africa, Soundway Records, Habibi Funk, Strut Records, World Circuit et même Born Bad Records depuis quelques années — et continuent encore de le faire. Remercions-les : ils sont les passeurs héroïques entre les paroles oubliées d’hier et les oreilles d’aujourd’hui.
Cette fois, c’est aux Disques Bongo Joe — Altin Gün, The Mauskovic Dance Band, Yīn Yīn ou l’Orchestre Tout Puissant Marcel Duchamp —de s’y coller. Le label qui avait aussi réédité il y a quelques années un excellent disque de post-punk espagnole post Movida, se lance cette fois-ci à la découverte de São Tomé-et-Principe. Afin de vous éviter de chercher sur Google Maps, précisons d’emblée la localisation de l’endroit : l’État insulaire, et volcanique, se situe dans le Golfe de Guinée, au large du Gabon, et pas bien loin de l’Angola.
L’Angola, c’est justement l’un des territoires favoris du français DJ Tom B, grand collectionneur des musiques de ces territoires autrefois tombés sous domination portugaise et qui ont su s’en libérer, comme beaucoup d’autres, au cours du XXe siècle — l’indépendance pour l’Angola, c’est 1975. C’est donc via cette attirance viscérale pour l’Angola que DJ Tom B a découvert il y a quelques années la musique, toute proche, de São Tomé-et-Principe, l’État insulaire qui a également obtenu son indépendance vis-à-vis du Portugal en 1975.
De là-bas, il a pu penser la compilation Léve-Léve (« Du calme » en langue locale), et cette musique aux « échos de semba et de merengue angolais, d’afoxê brésilien, de coladeira capverdien et de musique de danse caribéenne ». Dialectes locaux, musique lusophone, souvenirs brésiliens et influences angolaises (ils sont nombreux à São Tomé-et-Principe, à être passés par Luanda) : la compilation raconte des sons qui auraient pu basculer méchamment dans l’oubli sans l’intervention, souvent salvatrice, de Tom. « Luis, un employé du principal Centre Culturel du pays m’a présenté à de nombreux musiciens et m’a vendu des disques qui appartenaient à son père… ils étaient là, dans la jungle et la poussière depuis 30 ans, imprégné d’une odeur humide qui ne les quittera jamais… », raconte-t-il par exemple.
En avant-première et avant la sortie de Léve-Léve en janvier prochain, cette compilation qui raconte la musique des années 60-80 des deux petites îles de São Tomé et Principe est introduite sur Nova par ce morceau du groupe « Africa Negra » d’Aninha. Bon voyage.
Visuel en Une © Africa Negra 70’s Truck