On a adoré « Love What Survives ». Alors, on a rencontré Mount Kimbie.
On vous parlait déjà de tout le bien qu’on a pensé de Love What Survives ici, sans aucun doute l’un des grands albums de cette rentrée. Passé par Paris en juillet pour assurer la promotion de leur disque, rencontre avec Dominic Maker et Kai Campos de Mount Kimbie.
Dom, tu vis désormais à Los Angeles. À quel moment, dans la vie du groupe, est-ce que ce déménagement est arrivé ? Est-ce que ça n’a pas compliqué les choses pour la conception de cet album ?
Dom : Il y a un an et demi j’ai déménagé à Los Angeles quand on n’avait pas encore vraiment commencé l’écriture de notre album. Initialement cela n’a donc pas eu d’effet sur notre travail. Et puis je suis retourné en Europe très fréquemment, donc la distance, le temps qu’on a passé séparé…on ne peut pas vraiment voir le changement par rapport aux autres albums, ça a fonctionné de la même manière.
Mais en fait quand on a commencé à faire de la musique ensemble, on était toujours séparé afin de nous donner de l’espace pour travailler sur nos idées et ensuite on s’envoyait ça entre nous.
Kai : Après la plupart de notre travail se fait quand même à deux dans la même pièce. Donc il y a surtout eu plus de voyages, j’allais à Los Angeles ou Dom revenait en Europe.
Quelle était votre ambition avec Love What Survives ? Est-ce que vous aviez des objectifs particuliers ?
Kai : Non, on n’avait pas défini d’objectifs précis en termes de styles ou quoi que ce soit. On a juste essayé d’explorer de nouveaux univers je pense, et quand on a eu 50 ou 60% de l’album, quelque chose a commencé à émerger, des idées, des histoires se construisent, et on essaie de les accomplir au maximum. Mais au début il n’y avait pas de réel but et c’est au fur et à mesure de la composition que tu découvres un sens, ce que ça veut dire.
Vous voyez une sorte de fil rouge entre les morceaux ?
Kai : Il y a eu quelques synthétiseurs qui ont joué un rôle fondamental dans le disque… Je pense surtout que le lien entre les morceaux, c’est qu’ils sont très simples en comparaison à nos plus anciens qui étaient peut-être plus compliqués. Ils sont plus directs, structurés de manière plus traditionnelle et avec plus de respirations et d’espaces.
« Plus de respiration, plus d’espaces… »
Vos morceaux ont une manière de se structurer très particulière, ils prennent du temps pour se développer, les couches se rajoutent une à une…On sent vraiment une « patte » Mount Kimbie, est-ce que vous avez conscience de ça ?
Kai : Je pense que la structure des morceaux, les décisions qu’on fait autour de ça, c’est surtout une manière de souligner certains éléments. On a toujours été intéressé par des petites parties de chansons qui te font réellement ressentir quelque chose. Par exemple, on peut faire ça en ajoutant une mélodie ou un instrument qui n’était pas là avant. C’est une façon de mettre l’accent dessus et de dire : « Là c’est une idée, c’est ce que vous êtes censé suivre et écouter ».
Vous n’avez jamais eu autant de featuring sur un album, c’est plus inspirant de travailler en collaboration ?
Dom : Les collaborations se sont faites de manière très naturelle. On a fait appel à Archy de King Krule, Micachu, James Blake et Andrea Balenci. Ces quatre personnes sont une grande influence pour nous. Beaucoup d’idées que nous avions pour l’album n’étaient pas encore accomplies au moment où ces gens sont arrivés. Donc nous étions vraiment associés sur ces morceaux, c’est un processus commun.
Comment s’est passé l’enregistrement de la chanson avec King Krule ?
Kai : La chanson « Blue Train Lines », c’est juste Archy (King Krule) qui fait ses trucs. Rien n’était prévu et on ne savait pas ce qu’il allait faire ou la manière dont il ressentait le morceau. Ce jour-là, il était à fond quand il est arrivé en studio et il a amené une énergie dingue !
Pendant les quatre ans qui séparent vos deux albums, vous avez fait beaucoup de radio. Comment vous voyez cette activité par rapport à votre projet musical ?
Dom : Le fait de faire de la radio, c’était vraiment nouveau pour nous, on n’en avait jamais fait avant. Faire de la musique et de la radio, c’est très proche et ça nous influence. Avoir des invités qui viennent et parlent de la manière dont ils travaillent, ça alimente notre musique. Ça nous donne des idées et nous permet d’être en évolution constante. Et puis, le fait de sélectionner des musiques par exemple, ça nous a permis de mieux comprendre l’univers musical qu’on essaie de construire autour de nous. On a eu Archy et James Blake dans l’émission et puis des amis passaient dans le studio quand on enregistrait.
« Faire de la musique et faire de la radio, c’est très proche »
Est-ce qu’en étant un groupe, faire de la radio c’est pas le meilleur moyen d’inviter des gens qu’on aime, sympathiser et ensuite pouvoir bosser avec eux ?
Kai : Oui par exemple Actress était là dans notre dernière émission. C’est quelqu’un qui est d’une grande influence dans notre travail. Et on peut être nerveux de rencontrer quelqu’un comme ça, mais c’est cool car au bout d’un moment tu passes au-delà de ça et tu démarres une relation avec ces personnes, ils rentrent dans ton univers. Et oui peut-être qu’un jour quelque chose verra le jour !
Dom, tu as travaillé avec James Blake sur un morceau de l’album de Jay Z, à quel point ça diffère de la production avec Kai dans Mount Kimbie ?
Dom : C’était très différent car là, le but était d’écrire pour une autre personne. Du coup, l’objectif est d’essayer d’appliquer un peu de ce que tu sais, un peu de ton univers, dans celui de l’autre. Ça a été une expérience très intéressante, j’ai appris plein de choses.
Vous étiez ensemble en studio ou ça s’est fait à distance ?
Dom : Oui on était ensemble dans le studio. Ce qui m’a surpris, c’est que quand on était avec lui, la discussion était très ouverte. On se demandait tout le temps ce que chacun pensait de tel ou tel truc. C’était unique.
Mount Kimbie, Love What Survives, 2017, Warp Records
Visuel : (c) Warp Records