Avec « Neu! 2 » , les rockeurs de Neu! livraient des variations de leurs précédents singles pour des raisons autant économiques qu’artistiques.
Que faire quand on s’est lancé dans la production d’un album, qu’on en est à la moitié, qu’on a éclaté le budget de son projet, mais qu’il faut tout de même rendre la seconde moitié ? Ces questions à la fois économiques et artistiques, les rockeurs allemands de Neu! se les sont posés de nombreuses fois dans leur carrière faite d’expérimentations, de bidouillages de machines, et de productions parfois plus performatives qu’esthétiques.
Le message qui se cachait dans l’approche méthodologique des rockeurs était souvent aussi important que le son en lui-même. Pour Neu!, la musique est indissociable de sa conception. En témoigne le deuxième album de ces krautrockers (le krautrock, c’est la vague de rock proche de l’électronique qui a émergé en Allemagne a la fin des années 60), qui s’appelle tout simplement Neu! 2, suite au premier album Neu!.
Klaus Dinger et Michael Rother, duo formant Neu!, ont composé Neu! 2 à Hambourg, en studio, et quand l’argent vint à manquer pour financer de nouvelles créations, ils se lancent alors dans des relectures de singles qu’ils avaient sorti plus tôt, notamment « Super » et « Neuschnee ». Ces nouvelles interprétations ne sont pas exactement des remix, mais des variations des morceaux originaux. Ils rejouent certaines séquences à l’envers, à vitesses modifiées, parfois les deux en même temps. On entend ce travail sur « Neuschnee 78 » , « Super 78 », et dans « Super 16 », présent dans la B.O. de Kill Bill.
L’aspect expérimental de la musique de Neu! était pour eux une manière d’inscrire leurs œuvres au sein du mouvement Pop Art, c’était l’occasion de réfléchir à l’industrialisation de l’art. Ces expériences paraissent moins impressionnantes de nos jours, puissent que l’on peut facilement les reproduire avec une platine ou un logiciel, mais à l’époque proposer des versions altérées d’un morceau préexistant était un pari bien dans l’air du temps. Un choix économique, comme artistique. L’album se termine tout de même sur le single « Super » dans sa version original, et ça tombe bien parce qu’il est super.