Voici venu le premier album de la prodige de la jungle, Nia Archives. « Silence is Lost » est aussi dansant que profond, et il a fallu choisir notre titre préféré. C’est « Cards On The Table » qui entre en playlist.
Si, comme nous, vous suivez Nia Archives depuis un peu plus de deux ans, vous savez combien le premier album de l’artiste est, d’office, validé. Celle qui fut l’étoile montante de la jungle et de la drum’n’bass britannique n’a déjà plus rien à prouver, on sait qu’elle excelle pour piocher dans des influences diverses et nous chanter ses sentiments sur des bpm toujours effrénés. Sur ce premier album, « Silence is Loud », la jungle de Nia Archives semble faite pour danser et pleurer en même temps. Des textes profonds côtoient des nappes de synthés mélancoliques sans que, jamais, le tempo ne décélère. Notre Nouvo Nova s’appelle « Cards On The Table ».
Sa grand-mère tenait une radio pirate
Si vous découvrez cette raveuse à la prestance folle, laissez-nous faire les présentations. Nia Archives est née juste avant le nouveau millénaire, en 1999. Elle naît à Bradford, grandit à Leeds et quitte le foyer familial à 16 ans pour aller vivre seule à Manchester. Dans cette ville qui a abrité Chase & Status, elle commence à embrasser la scène DNB dans des nuits rythmées par la jungle bien-aimée qu’elle écoutait en grandissant. Parce que Nia Archives a ça dans le sang : ses parents font danser les copains dans leur jardin au son d’influences électroniques britanniques, de dub et de reggae. Sa grand-mère, première jamaïcaine de la famille à arriver à Bradford, tenait une radio pirate avec une de ses quatre sœurs.
Premières sorties en indé
Un héritage musical riche qui forge le caractère musical bien trempé de Nia. Elle découvrait LogicPro à 12 ans avec son beau-père, rappeur et producteur et se forme seule puis à la Community Music de Londres. Ses premières collaborations ne la satisfont pas. Elle veut chanter, mais les producteurs avec qui elle bosse ne respectent pas sa vision musicale. Elle dénonce les pratiques de la dance music qui, souvent, ne créditent pas les femmes noires qui prêtent leur voix à des productions de dance music. Tant pis pour eux, Nia Archives se lance en solo en 2020 avec le morceau « Sober Feels« . Elle essuie les refus de plusieurs labels et décide donc de le faire toute seule : ses EP Headz Gone West et Forbidden Feelingz sont publiés en indé… Et comme disent les anglais, « the rest is History » (le reste appartient à l’Histoire).
« I’ve always loved the chaos of jungle »
Nia Archives est le lien moderne entre le passé et le présent de la jungle. Son nom de scène la trahit, elle aime faire des références aux figures de l’histoire de la jungle music, tout en la rendant accessible et populaire (peu d’artistes jungle/drum’n’bass peuvent se vanter d’avoir été salués par les Brit Awards, ou les NME). Elle est la figure de proue d’un renouvellement de cette scène jungle/drum’n’bass : « Je rendrai toujours hommage aux OG et à l’essence de jungle mais la musique que je fais sera toujours différente parce que j’ai une expérience vécue différente, a-t-elle expliqué au magazine Clash. Je ne suis pas un homme de cinquante ans, je suis une fille de vingt-trois ans qui vit sa vie et j’utilise mes expériences personnelles pour éclairer mon art ».
Silence is Loud, confessions jungle
C’est ainsi que, un an après son dernier EP Sunrise Bang Ur Head Against Tha Wall, Nia Archives nous livre un album subtil, dansant mais honnête et mélancolique. Il s’ouvre sur un long cri primal suivi de près par un déluge de bpm. Sans décélérer, Nia Archives se confie, crie avec férocité sur un homme menteur (dans « Nightmares »), souffre du manque de ses proches dans le -pourtant très dansant- « F.A.M.I.L.Y », la DJ martèle aussi qu’elle se sent seule dans la foule (dans « Crowded Roomz »). Des conflits émotionnels bercés par des rythmes dansants et des prods plus radiophoniques. Un album définitivement innovant.