Il y a quelques années (et quelques albums) de ça, Nick Waterhouse dégainait un remarquable exercice de style rhythm’n’blues rétro et accrocheur en diable, nommé « Strange Love Affair ». On vous en remet sur l’électrophone car c’est bien une idylle que Nova Bordeaux et le Californien ont paraphée, par la grâce des ondes. On vous le dit et répète régulièrement ; ici, tiens, lors de sa précédente venue en terres girondines.
Un attachement pas étrange pour un sou, bien sûr, que ce soit un euro ou un antique nickel états-unien. Tout à l’inverse : ça sonne comme l’évidence même, tant sa défense d’un rock’n’roll à l’ancienne, gomina, amplis à lampes et 45-tours enquillés dans le jukebox, lorgnant tantôt sur la soul suave d’un Sam Cooke, tantôt vers les éraflures électriques des Them, Troggs et consorts, est magnifique, great et tout adjectif seyant à ce Gatsby attifé comme Buddy Holly. En bref, la classe américaine – sans les doublages cocasses, ça va sans dire.
En 2023, pour réussir la passe de six, l’emblématique sociétaire du label Innovative Leisure s’est plu à arborer la panoplie du Fooler. C’est le titre de son dernier album en date, sorti un 1er avril – journée prédestinée. Car la traduction, hasardeuse, de « fooler », c’est la blague, l’imposteur, le fumiste. C’est ce terme peu amène que certain.es, peu clairvoyant.es, avaient donné à Bob Dylan, lorsqu’il avait électrifié sa guitare au milieu des 60s, câblant hardiment les notes de ses chansons folk dans une prise survoltée, celle de la pop-music.
Ce lien entre classicisme rétro et aspirations pop, Nick Waterhouse l’entretient avec talent, ferveur et élégance. Et, aussi, un zeste de mélancolie. Celui qui suit des bouleversements radicaux – rupture amoureuse, déménagement transcontinental (en France, pour l’anecdote). Celui d’un San Francisco en voie de disparition, avec sa fameuse librairie City Lights (captée au Leica par le photographe Jim Marshall, pour la pochette de l’album) où il trainait, étudiant, lorsqu’il habitait à deux pas de là. « Toute ma vie s’est déroulée à l’angle de Broadway et de Columbus. Ça aurait pu être moi et mes amis sur cette photo. Peut-être bien que c’est le cas, d’ailleurs. Je ne sais pas. »
Un flou très artistique, un sfumato diraient les maîtres de la Renaissance, que Waterhouse fait aussi pencher vers l’enchevêtrement des temporalités et la confusion des sentiments ; un vague à l’âme dont le tissu d’incertitudes se soigne, se choie, s’enrubanne de cuivres, de cordes, de choeurs et de guitares ; une palette sonore luxuriante enregistrée en mono à Soil of the South, le petit studio de Mark Neill (producteur du Brothers des Black Keys, notamment) qui « ne ressemble pas à un vaisseau spatial, plutôt à un cabinet de dentiste de 1965 ».
C’est là où le pointilleux Waterhouse a lâché les rênes de ses morceaux. Moins de contrôle, plus de disponibilité. « Faire ce disque, c’est comme aller voir le maître de kung-fu sur la montagne. Je n’en allais pas être le producteur, arriver avec des idées arrêtées, des arrangements bien définis. Je pouvais simplement être – comme Mark l’a dit – le punk au pull en mohair. Prendre la guitare, jouer quelque chose et l’entendre dire : ‘Wow, il faut que tu fasses ça !’ Il était de bon conseil, très stimulant. Beaucoup de ses instincts m’ont guidé, encouragé, inspiré pour aller parfois à l’inverse de ce que j’aurais fait habituellement. Du genre ‘Oh, normalement, je rendrais ce morceau plus féroce alors qu’il veut qu’il soit plus doux’. Ça m’a ouvert l’esprit, ouvert des pistes. Rien n’était figé ; tout était si fragile, imparfait, en constante évolution. Il y avait presqu’un côté Nouvelle Vague française dans cette approche« .
Comme sur le « Hide and Seek » qu’on vous a beaucoup joué sur nos antennes, l’automne et l’hiver passé.
En guise de coda à ce petit papier, quoi de mieux de vous indiquer « Play to Win » afin de vous éclairer la marche à suivre et d’attirer sur vous les grâces insolentes de la chance, baraka et trèfles à quatre feuilles. Car oui, la Radio Nova Bordeaux vous offre des places pour cette venue de Nick Waterhouse à Barbey ; des billets doux À GAGNER ICI-MÊME, EN SUIVANT CE LIEN, avec le mot de passe Nova Aime.
Nick Waterhouse + Will Worden, le mardi 21 novembre @ Rock School Barbey (Bordeaux).