Ce trio francilien de « ménestrelles » adolescentes, dont le premier album rétro-pop-yéyé se contrefiche des formats, milite pour donner son avis « sur tout, surtout » et le droit de vote à tous les moins de 18 ans.
« Mon cher Sid Vicious, je t’admire tellement / Tu oses montreeeer ta haine envers la société-é-é / Alors que moi, j’ai peur de tout, de la police, de mes parents – et encore plus de mes enfants. » Ainsi démarre, d’une voix si sage, avec trois notes de guitare et un clavier fort minimal, Punk dissimulé, l’une des comptines du ravissant premier album auto-produit du groupe Paris Banlieue, trio francilien de « ménestrelles » rétro-pop-yéyé ; pendant quelques secondes, lorsque la narratrice incite à « piquer les fesses du surveillant avec un cactus », on croirait entendre les ballades naïves fredonnées jadis par Moe Tucker sur les disques du Velvet Underground. Mais qui sont ces jeunes filles qui semblent se contreficher des formats, rimes ou refrains, interrompant souvent leurs jolies chansons au bout d’une minute et demi, sans craindre les fausses notes, multipliant ruptures de ton et harmonies médiévales de poche, au profit d’histoires absurdes ou désuètes qu’on croirait tirées d’un vieux Rohmer, voire, plus près de nous, des films d’Hubert Viel (Artémis coeur d’artichaut, Les filles au Moyen-Âge) ?
En moins de vingt minutes, les « gueuseries » d’Adèle Duhoo et ses amies les sœurs Clara et Leonor Pernas possèdent plus d’idées, de vigueur, d’humour et de mélodies que toute la discographie de Julien Doré. Enregistrées par les défricheurs de sérieux enfantillages de Radio Minus, distribuées sur cassette audio, ces lycéennes militent aujourd’hui sur Nova pour donner leur avis « sur tout, surtout » et le droit de vote aux moins de 18 ans. Selon leurs analyses, l’écologie l’emporterait alors dans tous les suffrages. Conclusion, que tous les citoyens en culottes courtes reprennent déjà en choeur : « La viiiie me parle enfin ! »
Pour écouter l’album Gueuseries en intégralité, c’est ici.
Visuel © Les filles au Moyen-Âge, de Hubert Viel (2015).