Alors que le dernier half-time show vient de rafler le premier Emmy Award de l’histoire du programme, on se penche sur les coulisses de l’un des shows les plus visionnés de l’année.
Le 13 février 2022, le SoFi Stadium à Inglewood en Californie accueillait le Superbowl LVI (56e donc, si je me rappelle bien des chiffres romains), le match le plus important de l’année pour le football américain. Pendant 60 minutes, les Bengals de Cincinnati affrontaient les Rams de Los Angeles qui s’imposeront 23 à 20. Mais ce qui nous intéresse s’est déroulé à la mi-temps, une affiche qui pourrait presque rivaliser avec le Up in Smoke Tour.
West Coast à l’honneur
Alors que sonne la mi-temps et que les joueurs rentrent au vestiaire pour recharger les batteries, le public découvre une scène de plusieurs dizaines de mètres, dont la partie centrale ressemble à un studio de production immaculé. Confortablement posé aux commandes, Dr Dre lance le show.
S’enchaine alors des performances de Snoop Dog, 50 Cent (qui rappe la tête en bas, comme dans le clip d’In Da Club), Mary J Blige, Kendrick Lamar, Eminem montent tour à tour sur scène pour un half-time show d’anthologie, ou se mélangeait classiques immenses du répertoire rap de la côte ouest nord-américaine (The Next Episode, Still Dre, California Love…) et un morceau récent avec le Alright, de Kendrick. (Les puristes remarqueront que l’on s’autorise un petit passage sur la côté est pour “In Da Club”, mais puisque 50 Cent est le poulain d’Eminem, lui-même poulain de Dre, on reste dans le thème.)
Beaucoup de polémiques agitent la toile et les médias dans les jours qui suivent cette performance. “Alright” de Kendrick a été censuré, le “Po-Po”, faisant référence à la police, est retiré de la phase “And we hate po-po / Wanna kill us dead in the street fo sho”. Dre a failli être censuré aussi (la NFL lui a demandé de ne pas rapper le “Still not loving police” de “Still Dre”)
Le show de 14 minutes reste sensationnel, et la semaine dernière a été récompensé aux Emmy Awards 2022, dans la catégorie Outsanding Variety Special (Meilleure émission de comédie, musicale ou de variété), une première pour le Superbowl et une belle victoire pour le rap. Pourtant, les interprètes de ce show n’ont pas reçu un dollar pour leur performance.
En coulisse du half-time show
En effet, la NFL a pour tradition de ne jamais rémunérer les artistes pour leur performance de la mi-temps du Superbowl. Dans un entretien accordé à la revue Billboard Seth Dudowsky, head of Music de la National Football League exlique que les artistes ne perçoivent pas de gains, car l’exposition de l’événement leur rapporte déjà suffisamment.
Oui car si le stade d’Inglewood peut accueillir un peu plus de 70 000 fans, l’émission en elle-même est visionnée par plus de 110 millions de personnes (et sa retranscription sur Youtube totalise un chiffre similaire alors que l’on écrit ces lignes). La NFL considère que ce coup de pub justifie sa politique, et il est vrai que les streams des artistes impliqués augmentent significativement après leurs performances.
En 2022, c’est Dr Dre lui-même qui a financé les 7 millions de dollars nécessaires pour l’organisation du show.
Autre détail amusant appris lors de cet entretien chez Billboard, les répétitions prennent des mois et l’on prépare la scénographie bien avant d’avoir complété la programmation artistique. De plus, la NFL équipe le stade accueillant l’événement de baffles immenses qui diffusent des classiques de la musique étasunienne à fond pour que les habitants du quartier ne divulguent pas les morceaux des artistes pas encore annoncés qu’ils auraient entendu répéter.
Un texte issu de C’est Bola vie, la chronique hebdomadaire (lundi au vendredi, 8h45) de David Bola dans Un Nova jour se lève.