Par Alexis Breton de Nova Production.
Ce que vous entendez là, c’est une immense foule d’Argentins venue rendre un dernier hommage à l’idole du pays : Diego Armando Maradona.
Nous avons vu ces images, de joie, de tristesse, de cohue pour apercevoir son cercueil et beaucoup d’entre nous se sont étonnés de cette ferveur pour la disparition d’un homme dont le principal mérite était de savoir bien jouer au football.
Alors aujourd’hui, je vais tenter de vous expliquer pourquoi Maradona est si important pour les Argentins. Et pour y arriver j’ai fait appel à des proches, tous Argentins, dont vous écouterez les témoignages tout au long de cette chronique.
Mais tout d’abord, aux origines de l’histoire d’amour entre Maradona et l’Argentine, il y a un match de coupe du monde en 1986
« Je veux pleurer, je veux pleurer » hurle de bonheur le commentateur Victor Hugo Morales. « De quelle planète tu viens barrilete cosmico ? », ajoute-t-il alors qu’il ne peut contenir ses larmes. Beaucoup d’entre nous connaissent ce but venu d’ailleurs : Maradona lancé dans une chevauchée fantastique, dribble six Anglais et marque.
À ce moment précis, ce petit joueur d’à peine 1m65 cesse d’être Diego et devient Maradona.
Dieu… On dépasse à ce moment-là les frontières du football. Il faut savoir que quatre ans avant ce match, l’Argentine est humiliée par le Royaume-Uni lors de la guerre des Malouines. Ce match, c’est donc une sorte de revanche. Mais plus encore, 1986, c’est aussi une année charnière dans l’histoire argentine. L’année où le gouvernement démocrate amnistie tous les dirigeants de la dictature responsables de la disparition et de la mort de plus de 30 000 personnes. Grâce à Maradona, c’est tout un peuple qui relève la tête. D’autant plus que ce génie du football est issu de Villa Fiorito, un bidonville infâme des environs de Buenos Aires. Enfant il joue au foot sur des potreros, ces terrains vagues plein de boue et grandit dans le plus grand dénuement.
Dans une interview il dira d’ailleurs : « j’ai grandi dans un quartier privé… privé d’eau, privé d’électricité et privé de téléphone ». Son seul trésor, c’était un ballon de football qui ne le quittait jamais, même pour dormir le soir. Maradona, c’est donc aussi ça, c’est l’honneur du peuple des bidonvilles. Ceux qui en Argentine sont parfois traités de : « negro de mierda, de villero, ou de cabeza… ».
C’est le représentant des petits qui gagnent contre les grands.
Un membre de la famille… En Argentine, son portrait n’est pas seulement visible sur les murs de Buenos Aires, mais aussi dans les salons des maisons. Et comme pour un proche, une majorité d’Argentins lui pardonnent tous ses excès : drogue, enfants abandonnés et fréquentations scandaleuses. Parce que comme l’écrivait Eduardo Galeano : Diego Maradona c’est « dieu, mais un dieu sale, un dieu pécheur, le plus humain des dieux. »
Le 25 novembre, le cœur de Diego a arrêté de battre, mais son mythe vit encore et bien au-delà des frontières de l’Argentine. Sa mort a fait la une des plus grands journaux de la planète. Son souvenir a été fêté à Naples, son visage a été peint dans les ruines de Syrie et même au Bangladesh les gens sont sortis dans la rue pour lui dire au revoir.
Parce que Maradona est éternel.
Visuel © Getty Images / David Cannon