Faites le deuil de vos idées grises avec ce conte de fée désabusé en salles le 20 mars
La dernière fois qu’on a entendu parler de cendres et d’Islande c’était à propos d’un volcan au nom imprononçable (en fait si : Eyjafjallajokull). Dans Queen of Montreuil, il y aussi des cendres, mais elles sont françaises, ce sont celle du mari d’Agathe, jeune veuve inconsolable. Et il y a un volcan d’origine islandaise: la réalisatrice Solveig Anspach.
Anspach s’était fait une place dans le cinéma français avec Haut les coeurs! , chronique d’un cancer au féminin, mélo sobre et doux. Et puis on l’avait perdue de vue après un Stormy Weather, étrange film déjà sur le départ, s’étirant entre un coin de Belgique et une île nordique.
En 2007, elle faisait de nouveau signe avec Back Soon, balade loufdingue sur ses terres natales, autour d’une poétesse dealeuse d’herbe qui partait en vrille lorsqu’une oie avalait son téléphone portable et les numéros de ses clients. La chose était naïve, mais au sens primitif du terme : apprenant à faire ses premiers pas dans le burlesque et l’absurde
Le même sens du foutoir ludique et généreux anime Queen of Montreuil, sorte d’autoportrait revu et corrigé (Agathe comme Anspach, est une réalisatrice vivant dans la ville de Dominique Voynet). Avec un titre pareil, il y a de quoi se douter qu’on est dans une sorte de conte de fées, sauf qu’ici les princes charmants sont déjà morts et incinérés. Agathe se retrouve à faire son deuil avec une mère islandaise – qui est d’ailleurs peut-être la poétesse de Back Soon, en tous cas c’est la même comédienne, Didda Jonsdottir, qui l’incarne – et son fils, rencontrés dans un aéroport. En aussi peu de temps qu’il en faut pour le dire, les voila à squatter sa maison
Ils ne seront pas les seuls. Bientôt il y aura aussi, entre autres, une otarie dépressive dans la baignoire et un conducteur de grue. Queen of Montreuil organise ainsi sa petite cour des miracles et réussit ses paris, celui de parvenir à faire rire avec une histoire de deuil n’étant pas le moindre. Ici, rien n’est vraiment grave, même quand on évoque la crise bancaire mondiale et la manière dont l’Islande l’a prise à bras le corps ou quand s’organise une cavale après une robe de mariée rose par un travesti, ça reste avec fantaisie. Voire avec la grâce d’une mise en scène beaucoup plus concentrée que ce que l’on pourrait croire – rien n’est plus difficile que de filmer le chaos sans se faire envahir par lui- ou de comédiens (Florence Loiret-Caille et Samir Guesmi, comme d’hab’ absolument impeccable). Mais surtout en mouvement.
Car Queen of Montreuil est un film qui swingue, dans son scénario zinzin, poétique et utopique (puisqu’on y apprend que toute épouse qui surmonte la mort de son mari, devient obligatoirement une reine ou qu’en France les étrangers sont formidablement accueillis et intégrés). En fait ce n’est d’ailleurs peut-être pas un film mais un rêve ou Anspach se permet, d’élargir le cadre de ses tous petits moyens, par des visions tirant vers une folie douce, séduisante parce que forcément plus belle que la réalité. Le plus beau ? Que ce film reste en permanence ouvert, à tous les rebondissements possibles comme à tout le monde, frais et aérien comme un courant d’air.
En salles le 20 mars